vendredi 28 juin 2013

Guatemala, témoignage et richesses d'un engagement

Aline Herrera témoigne 
de son engagement 
d'une année au Guatemala

Par PBI (Suisse) 

Aline Herrera est de retour en Suisse après avoir passé une année au Guatemala. Elle nous décrit ses sentiments ambivalents et les richesses qu'elle retire de son engagement. Aline Herrera est partie en mai 2012 pour le projet Guatemala. Elle souhaitait "pouvoir apporter au moins un appui modeste à ces défenseurs qui se tournent vers [PBI] pour être soutenus et poursuivre leur lutte en faveur de la promotion de la paix et du respect des droits humains". Des paroles engagées qui prennent plus de poids lorsqu'au retour c'est l'émotion qui prime au moment d'évoquer les souvenirs marquants de son séjour.

Son témoignage après une année sur le terrain est en effet rempli d'émotions contradictoires, joie d'être rentrée chez elle mais peine d'avoir quitté un pays qui lui a apporté beaucoup. Les nombreuses rencontres qui ont émaillé son séjour lui donnent force et espoir, des sentiments puisés auprès de l'équipe PBI sur place mais surtout auprès des nombreux défenseur-se-s côtoyés qui continueront à lutter pour le respect de leurs droits.

Elle évoque également le procès de l'ancien général Ríos-Montt, auquel elle a pu assister car PBI Guatemala a accompagné l'un des avocats des victimes.  

Après son retour : Une année au Guatemala…

Après une année intense et bouleversante au Guatemala, me voilà de retour en Suisse. Difficile d’en tirer un bilan étant donné les multiples étapes traversées au cours de ces douze mois au sein du projet PBI Guatemala. Les émotions sont partagées ; je ressens d’une part une certaine allégresse d’être retournée à un entourage sécurisé, une bureaucratie qui fonctionne et de retrouver une vie sociale active au sein de ma famille et de mes proches. 

D’autre part cependant, une frustration, impuissance et nostalgie me gagnent parfois sachant la distance qui me sépare des défenseuses et défenseurs guatémaltèques qui m’ont tant appris au cours de cette année. Cette lutte pour le respect de leurs droits, leur bravoure, énergie et résistance sont autant d’éléments qui m’ont profondément émue. Ces personnes fantastiques m’ont permis d’ouvrir les yeux, de découvrir une autre cosmovision, culture et sensibilité, de réaliser quelles sont les vraies valeurs dans une vie et de comprendre au mieux les racines historiques et actuelles de cette lutte constante et pacifique visant à faire respecter leurs droits. 

Qu’ils soient paysans ou avocats, hommes ou femmes, citadins ou de la campagne, issus de peuples autochtones ou ladinos, les défenseuses et défenseurs que j’ai eu la chance de côtoyer m’ont profondément impressionnée par cette force individuelle et collective qui les pousse à revendiquer leurs droits.

Un procès historique
 
Au cours des derniers mois dans l’équipe, j’ai notamment pu assister à l’événement historique qu’a été le procès pour génocide des anciens généraux José Efraín Ríos Montt et José Mauricio Rodríguez Sánchez. Accompagnant Edgar Pérez Archila, l’un des avocats représentant les victimes, l’équipe de PBI Guatemala a ainsi suivi jour après jour les étapes mouvementées de ces audiences. Les témoignages m’auront marquée à jamais, tout comme l’émotion éprouvée lors de la lecture du verdict condamnant l’ancien chef d’Etat José Efraín Ríos Montt. 

Bien que la peine ait été annulée quelques semaines plus tard, l’espoir qui a émané au cours des derniers mois a permis à une partie de la population victime de la guerre de croire enfin à une justice, de rompre le silence et de se confronter aux démons passés.

Toujours plus de danger pour les défenseur-se-s

Malgré ces avancées, la situation des défenseuses et défenseurs guatémaltèques demeure pourtant précaire. Les urgences auxquelles nous avons dû faire face cette année se sont multipliées. Les délogements forcés, attaques à main armée ou détentions illégales ont malheureusement été chose courante. C’est grâce pourtant aux remerciements fréquents que nous adressent les personnes que nous accompagnons que nous trouvons l’énergie qui nous permet de croire que notre présence n’est pas vaine et que notre contribution peut faire une différence.

Richesses de l'engagement

Même s’il n’a pas toujours été facile de cohabiter et travailler à plusieurs, le fait de partager le quotidien en compagnie d’une dizaine de volontaires en provenance de pays différents a été une expérience enrichissante sur bien des niveaux et m’a permis de tisser des amitiés sincères au sein de cette nouvelle famille. 

Qu’il s’agisse ainsi des rencontres mémorables, des rires partagés, des moments plus difficiles lors d’accompagnements ou de problèmes internes, de la diversité du travail entre bureau, terrain et réunions multiples avec les autorités et d’autres organisations, cette année restera gravée à jamais. J’espère ainsi pouvoir, en Suisse désormais, continuer à apporter ma petite graine pour que soient enfin respectés les droits pour lesquels luttent ces personnes admirables que sont les défenseuses et défenseurs des droits de l’homme.
Avant son départ pour le Guatemala

« Les études universitaires et les stages effectués durant ces dernières années m’ont permis d’en apprendre davantage sur les droits de l’homme et en particulier sur le travail des défenseur-e-s de ces droits universels et fondamentaux. Ces personnes courageuses trop souvent risquent leur vie ou sont victimes de menaces, de harcèlement, de détentions arbitraires ou d’enlèvements. 

La frustration et l’impuissance ressenties lors de la lecture des multiples articles et rapports relatifs aux violations des droits de l’homme et à la situation des défenseur-e-s m’ont incitée à effectuer des recherches afin de trouver une manière de m’engager concrètement, sur le terrain, afin d’établir un contact direct avec ces personnes, de mieux comprendre leur réalité quotidienne et d’essayer de les soutenir d’une manière ou d’une autre.
 
Le travail de PBI a dès lors attiré mon attention. Les principes prônés par cette ONG internationale, ainsi que son mandat et sa manière de travailler, par le biais notamment de l’accompagnement protecteur, ont d’emblée correspondu à mes attentes. 
 
J'ai décidé de rejoindre le projet Guatemala pour plusieurs raisons. Tout d'abord l’histoire du pays mais surtout les thématiques sur lesquelles se focalise le travail de PBI sur place: droits des populations autochtones, droits liés à la terre, la lutte contre l’impunité et les effets de la globalisation sur les droits de l’homme. Cette année au Guatemala représente pour moi une opportunité de mieux comprendre ces sujets complexes et de saisir l’ampleur du travail des défenseurs des droits de l’homme, dans un pays où les injustices et l’impunité perdurent.
 
Je ne m’attends pas à ce que le contexte du Guatemala change pendant que j'y serai. Toutefois, en tant que volontaire PBI, j’espère pouvoir apporter au moins un appui modeste à ces défenseurs qui se tournent vers cette ONG pour être soutenus et poursuivre leur lutte en faveur de la promotion de la paix et du respect des droits humains. 
 
Vivre en Suisse est semblable à vivre dans un petit espace protégé en comparaison avec la majorité des autres états dans le monde. Je me réjouis dès lors de sortir de cette bulle quelque temps pour apporter ma contribution en aidant les défenseurs guatémaltèques dans le besoin ».


Source : Article et photo  Brigades de Paix Internationales (Suisse)