La violence contre les Travailleurs Ruraux Sans Terre dans l’État de Pernambouc dénoncée à l’ONU
Par Terra de Direitos
Plus de cent familles du Campement Gregório Bezerra, de
Agrestina/Pernambuco, subissent de constantes agressions physiques et
psychologiques depuis l’occupation des terres de l’hacienda Serro Azul
en avril 2011. Plusieurs dénonciations sur la situation de ce campement
ont été déposées auprès des pouvoirs publics brésiliens sans que soit
prise aucune mesure de protection des travailleurs ni que soit
sanctionné aucun des auteurs de ces crimes.
Le Mouvement des Travailleurs Ruraux Sans terre – et l’organisation des Droits Humains Terra de Direitos
ont donc envoyé ce 20 septembre 2012 une dénonciation á l’Organisation
des Nations Unies – ONU sur la violence perpétrée contre les
travailleurs ruraux sans terre qui vivent dans les campements de l’État
de Pernambouc.
Ces faits se sont produits depuis l’occupation des terres
improductives de l’hacienda Serro Azul, latifundo de près de mille
hectares, le 18 avril 2011, dans la municipalité d’Agrestina.
Les plus de cent familles des campements sont constamment agressées
par un représentant de l’hacienda, Luis Reis, et par près de 15 gardes
particuliers des propriétaires. A partir de février 2012, le Sergent de
La Police Militaire de Pernambuco José da Costa Lima s’est joint à la
répression contre les habitants du campement.
La participation directe
de Lima a généré une intensification de La violence et signifié la
formation d’une milice privée pour protéger les intérêts du propriétaire
du latifundio.
La dénonciation envoyée à l’ONU explique que ce policier militaire
est également impliqué dans d’autres situations de violence contre des
travailleurs ruraux et reçoit des “lopins de terre” pour services rendus
et autres « faits d’armes » dans la région.
En échange de l’exécution
d’expulsions forcées, Lima a reçu des terres dans les municipalités de
São Joaquim do Monte et Agrestina, État de Pernambouc.
Une autre action
illégale du sergent s’est produite ce 25 juillet 2012, lorsqu’il a tiré
sur des travailleurs ruraux. Lima fut arrêté pour ces faits mais fut
aussitôt relâché.
Face aux différentes violations commises contre les familles
paysannes du Campament Gregório Bezerra, la dénonciation de l’ONU exige
de l’État brésilien qu’il informe sur les mesures prises pour protéger
la vie des travailleurs, pour enquêter et punir les responsables de ces
crimes et pour mettre en oeuvre l’expropriation de l’hacienda Serro Azul
en application de la loi sur la fonction sociale de la propriété
rurale.
La dénonciation demande également à l’ONU de faire des
recommandations pour surmonter la situation de violation des Droits
humains au Brésil.
Historique de la violence
Quelques jours après l’occupation des terres de l’hacienda, les
familles ont obéi à un ordre judiciaire de rendre la terre au grand
propriétaire et ont abandonné volontairement la zone, sur base de la
promesse des pouvoirs publics d’enquêter sur la plainte pour
non-accomplissement de la fonction sociale des terres.
Les familles ont
monté un campement dans un lieu proche de l’hacienda Serro Azul, et bien
que demeurant en dehors de la propriété, ont continué à subir des
menaces.
En octobre 2011, sans la moindre tentative de négocier en vue de dégager une issue pacifique, les familles ont été brutalement expulsées, leurs maisons brûlées sans qu’il leur soit permis de retirer leurs objets personnels ; quelques uns des travailleurs se trouvaient encore chez eux lorsque les buldozzers ont commencé à détruire les constructions ; et les travailleurs qui ont tenté de réagir ont été menacés de prison.
L’action violente a compté sur la participation du Promoteur de
Justice du Bourg d’Altinho, d’un officier de justice et de policiers
militaires faisant partie du Bataillon “Companhia Independente de
Operações e Sobrevivência na Caatinga – CIOSAC”, du Groupe d’Appui
Tactique Itinérant – GATI et de la Troupe de Choc, accompagnés de Luiz
Reis, représentant de l’hacienda Serro Azul et de plus de 20
“pistoleros” armés.
Faute de réponse de la part des autorités responsables, le 28 janvier
2012 les travailleurs ont réoccupé l’hacienda Serro Azul.
Une autre
série d’actes de violence fut commise contre les habitants des
campements, jusqu’à une nouvelle expulsion forcée le 9 mars. Campant de
nouveau aux abords de l’hacienda, les travailleurs ont continué à subir
menaces et pressions.
Dans un des cas les familles ont été surprises par des tirs d’armes à
feu en pleine nuit. Deux femmes et un adolescent de quinze ans ont été
atteints par les tirs.
Une autre menace répétée est la présence aux
alentours du campement d’hommes armés montant à cheval, intimidant les
travailleurs avec des armes à feu et avec les chevaux eux-mêmes.
Ce 29 mai, un adolescent du campement fut menacé d’une arme à feu par
Luiz Reis, alors qu’il sortait d’une église dans la municipalité d’
Altino.
D’autres dénonciations contre Reis ont pour motif l’agression
physique envers une agricultrice blessée à la gorge, et pour coups et
blessures à un paysan, qui a eu deux côtes brisées et a été menaçé d’une
arme à feu par le policier militaire Roberto José da Costa Lima. Cinq
travailleurs ruraux, parmi les dirigeants du campement et du MST, sont
menacés de mort.
Délit par omission de l’État brésilien
Le cas de l’hacienda Serro Azul montre non seulement une claire
démission de l’État mais aussi la participation de certains agents
publics dans les violences physiques et psychologiques contre les
travailleurs.
La Police Civile de l’État de Pernambouc, sans approfondir
les enquêtes sur les différents crimes commis contre les familles, a
classé tous les dossiers relatifs aux dénonciations.
Sur la base du rapport de classement de l’enquête, les magistrats du
Ministère Public de l’État de Pernambouc ont également archivé la
plainte contre le promoteur de Justice du Bourg d’Altinho.
La Promotrice
Agraire de l’État de Pernambouc a critiqué durement le classement et le
délit par omission de la Police Civile.
Campagne d’appui aux familles
Pour sensibiliser l’État brésilien et adopter des mesures face à la
situation de violations des droits humains contre les travailleurs, une
campagne d’envoi de lettres est lancée avec l’appui de l’organisation
Grassroots International. En tout ont déjà été envoyées plus de sept
mille lettres d’appui du monde entier pour exiger des mesures en faveur
des familles.
Source : MST du Brésil