mardi 7 mai 2013

Plan Condor, coordination judiciaire des pays du cône sud

 La contrepartie 
judiciaire
 du Plan Cóndor



Par Alejandra Dandan - Traduction de Libres Amériques

Des représentants de pays de la région (du cône sud) lancent un groupe de recherche sur l’organisation répressive des dictatures. Le projet concernerait l’Argentine, l’Uruguay, le Brésil, le Chili, la Bolivie et le Paraguay, il vise à développer « un mécanisme d’action fluide et d’information pour l’avancement  des causes » a déclaré Baltasar Garzón, participant (et acteur) de cette initiative. Au cours de la dernière semaine, un projet inédit a commencé à prendre forme pour la région: un protocole pour coordonner une politique d'enquête et de poursuites pénales contre les acteurs du Plan Condor.

Cette politique, dès son commencement, s’est engagée à penser l’organisation répressive des dictatures en des termes régionaux. Et la région comme seule plate-forme, pour articuler des moyens et des stratégies, et en même temps, chaque pays favorisera les processus de justice, ils auront avec eux comme pilote le juriste espagnol Baltasar Garzón : 

« Nous avons réfléchi sur les possibilités de coopération dans le domaine du Plan (ou Opération) Condor entre les pays de la région » (...) « Peut-être en utilisant des mécanismes, qui bien que n'étant pas expressément encore fixé, comme en Europe, permettront à chaque magistrat (juge, procureur) d'établir un mécanisme fluide d'action et d'information pour l’avancement des causes ».

Garzón s’est joint à une rencontre de travail avec le député Remo Carlotto, président de la Commission des droits de l'Homme de la Chambre basse, et trois procureurs de la région :

-  Maria Tellechea Reck, pour l'Uruguay a présenté lors de la rencontre les difficultés à faire avancer la recherche sur la dictature, depuis les dernières dispositions de la Cour Suprême de Justice dans son pays.

- Le Brésilien, Ivan Marx est chargé de l’unité de coordination judiciaire des causes de la dictature dans un pays où la loi d'amnistie ralentit la progression de la majorité des cas, dans le même temps et par une autre voie le travail de la Commission pour la Vérité maintient grand ouvert les canaux des recherches.

- Et l'Argentin, Miguel Angel Osorio est chargé de la principale recherche du Plan Condor ici (en Argentine), sur le processus ouvert à la fin des années 90, quand l’impunité était encore en vigueur dans les lois, couvrant environ 350 victimes, dont il existe 106 cas de personnes assassinées ou disparues, maintenant traversant les instances d’un procès. Pour cette rencontre  a été également invité Pablo Vassel, chargé des droits de l'Homme au Conseil de la Magistrature.

Les cas de crimes contre l’Humanité, en Espagne pendant l’existence des lois sur l’impunité en Argentine, non seulement, permirent l’accès à la justice pour les victimes, mais ils se sont aussi convertis en un outil stratégique pour pousser au sein des frontières les recherches suspendues.

Selon le même schéma, Remo Carlotto a considéré lors de la réunion, qu'il était possible de penser que les recherches actuelles sur le Plan Condor pouvaient s’améliorer et permettre aux processus de justice des pays de la région ayant des difficultés de faire avancer ces causes. « Nous avons déjà fait cinq réunions dans la région, ou nous avons invité les opérateurs des systèmes de justice et les organisations de défense des droits de l'Homme, parce que nous voyons que nous sommes tous dans le même cadre ou volonté politique sur la question », a-t-il précisé.

« Nous assistons à une situation de méfiance de la part de chaque pays, comme cela s'est produit dans le cas du Brésil ou de l'Uruguay. Nous croyons qu'une articulation de politiques peut fonctionner, comme cela s'est produit avec ton action en tant que juge en Espagne et les effets obtenus sur la situation interne de l’Argentine », a déclaré le député Carlotto à Garzon. « A ce moment, nous avons trouvé hors de l'échelon national, un lieu où nous pourrions poursuivre les réclamations en justice, malgré la structure de l'impunité qui était en place ici. L'un des débuts les plus simples, dans ce sens, pouvait être l'articulation de l'information, mais il ne faudrait pas oublier que la raison du procès du Plan Condor est devenu maintenant un élément devant avoir un impact sur chacun des pays pour que cette ouverture se produise. »

Les formes

Le projet, qui en est encore à cela (aux formalités), il apparaît comme la contrepartie du plan de coordination d'action répressive que les dictatures du Cône Sud ont mises en place dans les décennies 1970 et 1980. Ceci qui, jusqu'à présent a été enquêté sous une forme isolée par quelques magistrats spécialement dans notre pays, il pourrait réunir l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay et, comme il a été laisser dire, aussi au Chili, au Paraguay et en Bolivie, dans une articulation afin d’enquêter et de juger les responsables des violations des droits de l'Homme.

« Jusqu'à maintenant, il avait le caractère d'un "protocole" et, par les accords qui ont pris forme lors de la réunion, le premier brouillon pourrait être prêt au milieu de l’année. Un des espaces possibles dans lesquels le protocole pourrait être encadré est le parapluie du Mercosur, parce qu'il prévoit des mécanismes d'articulation juridique entre les États. Mais il est aussi appelé à avoir pour recours à des expériences similaires mises en place en Europe, ce qui a été au commencement comme l'initiative personnelle de quelques juges et procureurs a fini par être réglementé par le Parlement de l’Union Européenne. »

La manière par laquelle à commencer à se penser le projet a deux parties. Un espace clef politique, qui encadre et explique l’entité du Plan Condor, et par conséquent, la pertinence de le penser en fonction de son lien avec chaque pays. Et un aspect technique pour lequel il sera nécessaire que chaque (pays) intégrant revoit la législation interne, pour saisir comment et jusqu’où peut se penser l’articulation » a précisé le juriste Garzon. « Si tu as des cas concrets, tu as besoin d'un contexte avec lequel on peut élaborer un cadre ». « Un contexte dans lequel telle personne a commis ce fait, - qui n'est pas le seul fait, - mais qui était dans le contexte du Plan Condor, qui lui-même était à son tour un mécanisme de coordination délinquante. Ce contexte peut unir chacun des pays à pouvoir faire circuler la documentation dont ils ont besoin. L'un peut dire : J'ai ces données, j'ai besoin de telles autres. Ou, de ce témoignage, on peut comprendre telle question. L’ensemble aura pour formalité de permettre les mécanismes de coopération. »

Les zones grises

A aucun des participants de la réunion n’a échappé que cet accord, qui commence à être penser uniquement en termes juridiques peut tomber sur des questions de politique intérieure. Les éventuelles demandes par exemple d'un pays à l'autre devraient peut-être passer par les ministères des Affaires étrangères de chaque Etat. Le Ministère des Affaires étrangères de l'Argentine a déjà précisé qu'il pouvait résoudre ce type de demande, le jour même, pour que « les canaux » puisse fonctionner. Personne ne sait, en revanche, ce qui se passera dans le reste du pays, mais ceux qui étaient autour de la table ont compris qu’un tel protocole devait pouvoir aller de l’avant, et produire un effet de vase communicant sur le reste des causes (ou actes de justice).

« A nous tous, ils nous intéressent, qu’il existe un contexte pour interpréter ce qu’est le Plan Condor, en appartenance a chacune des enquêtes des différents pays et à la documentation des différentes archives » a déclaré Garzon. L’idée est de trouver un mécanisme, et il y aura sûrement des résistances, le Chili n’est pas l’Uruguay ou le Brésil, s’il existe un mécanisme de coopération juridique interne en Amérique latine et un cadre plus avancé, tu établis pratiquement un large espace de communication et d’information, il va venir bousculer à un moment cet état (de fait). »

Les autres points de vue

L’existence d’un accord régional a été perçue comme une nécessité pour chaque magistrat. Dans les faits, en raison de la cause Condor, par exemple, le procureur Osirio a enquêté sur le déploiement du Plan au Paraguay, au Chili et en Uruguay, mais dans chacun des pays, il a rencontré des difficultés différentes. «  Ce que j’ai vu, ce sont des difficultés pour articuler une politique de manière commune sur les persécutions criminelles, comme étaient ainsi les affaires à cette époque. », a t-il dit. « A une période donnée, il semblait que nous pouvions avancer sur certaines causes dans un des pays, et dans un autre pays à un autre moment se diluer » ; s’interrogeant sur « comment faire avec ces questions qui ont à voir avec notre Grande Patrie (l’Amérique latine) avec quelque chose que je crois très nécessaire, parce que, quand nous travaillons sur le Plan Condor, nous construisons la Grande Patrie, sans le déclamer. »

Pour l’uruguayenne Tellechea Reck, la possibilité d’un protocole serait extraordinaire : « Nous n'avons pas ouvert une cause Condor (au sens militant), nous savons qui a participé, nous avons des cas, nous entendons ce qui s'est pratiqué, mais nous n'ouvrons pas à une cause. En Uruguay, nous avons un processus encore inquisitoire. Le procureur demande des accusations, mais il ne relaie pas les preuves ; si bien qu'il n’a aucun type de participation, ce n'est pas la vraie fonction qu'il doit avoir. Je crois qu'une articulation comme celle-ci serait extraordinaire et, de fait, j’ai une quantité d'éléments du Plan le Condor », a-t-elle expliquer. Entre autres causes, celle d'un groupe de fusillés, ils avaient été séquestrés dans les Automotrices Orletti, ils les ont transportés en avion en Uruguay et les ont assassinés à leur arrivée. ».

Le Brésilien Ivan Marx s’est montré enthousiaste : « Nous avons mis en place au Parquet Général un groupe que je coordonne, qui travaille avec magistrats dans les cas de crimes contre l'Humanité. Actuellement la Cour suprême est en train de changer et ce qui apporte quelque espoir. "

Au Brésil en l’état, il y a quatre dossiers ouverts à partir des cas de crimes, y compris les disparitions forcées, qui continuent leurs cours (ou procédures), parce que les victimes sont toujours portées disparues. Une même faille a permis ici, à la fin des années 1990, la réouverture de l'affaire du Plan Condor, quand les lois d'impunité étaient encore en vigueur.  « Avec les causes ainsi poser, nous pourrions continuer sans avoir besoin de discuter de l'amnistie, ainsi nous posons dans les principes fondamentaux ce qui constitue des crimes contre l'humanité et l'accusé devrait être poursuivi, nous citons devant la Cour Interaméricaine des Droits de l'Homme, entre autres exemples ». « Après expliquer plus en détail le rôle de la Commission pour la Vérité, elle  propose de faire un réseau d'information et un atelier au Brésil au milieu de l’année ».


Source : PAGINA 12