dimanche 9 décembre 2012

Amériques, les défenseurs des droits humains en danger

Amériques : 
les défenseurs des droits humains 
sont de plus en plus souvent 
pris pour cible et attaqués


par Amnesty International (Communiqué)

Sur l’ensemble du continent américain, les défenseurs des droits humains font face à une recrudescence des actes de harcèlement, d’intimidation et de violence de la part des forces de sécurité, de groupes paramilitaires et de membres du crime organisé, écrit Amnesty International dans un rapport publié le 7 décembre 2012.




Sur l’ensemble du continent américain, les défenseurs des droits humains font face à une recrudescence des actes de harcèlement, d’intimidation et de violence de la part des forces de sécurité, de groupes paramilitaires et de membres du crime organisé, écrit Amnesty International dans un rapport publié le 7 décembre 2012.


Les défenseur-e-s des droits humains dans les Amériques, ce document a été élaboré à partir de quelque 300 cas de harcèlement, intimidation, attaque et homicide de défenseurs des droits humains intervenus dans une quinzaine de pays, pour la plupart entre janvier 2010 et septembre 2012.


« Dans presque tous les pays américains, les défenseurs des droits humains sont harcelés, attaqués et poursuivis sur la base de charges non fondées, a déclaré Nancy Tapias-Torrado, chercheuse sur les Amériques à Amnesty International, spécifiquement chargée de la situation des défenseurs des droits humains. Conduites de manière systématique, ces persécutions ont pour objectif de les empêcher de défendre les droits des plus marginalisés. » 


À travers le continent, des défenseurs des droits humains ont été désignés publiquement comme étant « illégaux », « illégitimes », « sans scrupules » et même « immoraux ». On les accuse d’être des criminels, des personnes corrompues, des menteurs, des fauteurs de troubles ou des individus subversifs ; on les accuse de défendre des délinquants et des criminels ; on les accuse de soutenir des groupes de guérilla. Ces critiques publiques ont été proférées par des responsables publics comme par des acteurs non étatiques.


« Les hommes et les femmes qui œuvrent pour la protection des droits humains sont également pris pour cible parce qu’ils apparaissent aux yeux de puissants intérêts économiques et politiques comme des obstacles à de grands projets de développement », a poursuivi Nancy Tapias-Torrado.


Parmi les personnes particulièrement visées figurent les militants qui travaillent sur les questions liées à la terre et aux ressources naturelles, sur les droits des femmes et des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres ou intersexuées, ou sur les violences contre les migrants ; ceux qui combattent pour que les auteurs de violations des droits humains répondent de leurs actes devant la justice ; et des journalistes, des blogueurs et des syndicalistes. 


Parmi les quelque 300 cas examinés par Amnesty International, les responsables directs ont été condamnés dans quatre affaires seulement. 


Près de la moitié de ces cas sont intervenus dans le cadre de litiges fonciers, dans des pays tels que le Brésil, la Colombie et le Honduras ; plusieurs étaient liés à de grands projets de développement conduits par des compagnies privées. 


À Cuba, au Mexique et dans d’autres pays, des défenseurs des droits humains ont été victimes de harcèlement judiciaire et arrêtés sur la base d’éléments de preuve douteux ; dans certains cas des mandats d’arrêt sont émis mais restent sans suite, et des militants demeurent ainsi sous la menace de fausses accusations pendant des années. 


À Puebla, au Mexique, les militants des droits des indigènes José Ramón Aniceto Gómez et Pascual Agustín Cruz ont été libérés de prison le 28 novembre 2012 après que la Cour suprême de la nation eut annulé la condamnation inéquitable dont ils avaient fait l’objet.



Ces deux hommes avaient été condamnés le 12 juillet 2010 à sept ans d’emprisonnement, sous l’accusation d’un vol de voiture. 


L’affaire judiciaire avait été déclenchée par un membre d’un puissant groupe local qui contrôlait depuis des années l’approvisionnement en eau et faisait payer l’équivalent de quatre mois de salaire à de nombreux habitants pour qu’ils puissent accéder à cette ressource. José Ramón Aniceto Gómez et Pascual Agustín Cruz se battaient pour obtenir que les habitations soient raccordées à un service gratuit de distribution d’eau.


La décision de la Cour suprême dans cette affaire vient confirmer que la mise en cause des deux hommes était une totale injustice, comme l’avait conclu Amnesty International.


Dans plusieurs pays du continent américain, des militantes des droits des femmes mobilisées sur la question des violences faites aux femmes, entre autres, ont été violées, menacées de viol ou soumises à des intimidations ; des proches de ces femmes ont également fait l’objet de menaces.


Le 9 novembre 2011, un homme armé et une femme sont entrés chez Jackeline Rojas Castañeda, une militante colombienne des droits humains qui vit à Barrancabermeja. Les deux agresseurs ont tenu en joue cette femme et sa fille de 15 ans, dans des pièces séparées. Ils ont prévenu qu’ils tueraient l’adolescente si elle cherchait à appeler au secours.


Ils ont attaché Jackeline Rojas Castañeda et l’ont bâillonnée, puis ont apergé son corps et ses vêtements de peinture rouge. Ils lui ont demandé avec insistance où se trouvaient son fils et son mari, un dirigeant syndical. Ils se sont emparés de deux ordinateurs portables, de clés USB, de téléphones mobiles et de documents.


Le 10 novembre, Jackeline Rojas Castañada – qui est une membre éminente de l’Organisation féminine populaire – est allée signaler les faits au parquet. Le personnel a refusé dans un premier temps d’enregistrer sa plainte en l’accusant d’avoir inventé l’agression.


« Lorsque les autorités refusent de protéger ceux qui œuvrent en faveur des droits fondamentaux de tous, lorsqu’elles n’ouvrent pas d’enquête sur les attaques dont ces défenseurs sont victimes, elles envoient le message que ces attaques sont tolérées, a déclaré Nancy Tapias-Torrado.


« Il est du devoir des gouvernements de garantir la protection totale des défenseurs des droits humains. Cela implique, au minimum, que l’importance et la légitimité du travail de ces militants soient reconnues, que les attaques et violences dont ils sont victimes fassent l’objet d’une enquête complète, et que de véritables mesures de protection leur soient fournies. »



Source : Amnesty International