Le féminicide des originaires
du Canada :
une honte
toujours sans solution
Par Laia Farrera (*)
La violence, le racisme, et la pauvreté touchent de manière
disproportionnée les femmes amérindiennes au Canada, lesquelles selon les
statistiques ont une plus grande probabilité de mourir de façon violente que
les femmes non originaires. Tout au long des dernières décennies au moins 580
femmes d’ascendance amérindienne ont disparu ou ont été assassinées au Canada.
Aux alentours des 40 cas documentés se sont déroulés sur la tristement connue «
route des pleurs », longue de 800 kilomètres sur le réseau autoroutier
n°16.
Le parcours de cette route passe par de nombreuses localités
amérindiennes situées entre les états du Manitoba et de la Colombie
britannique, où réside une grande partie de la population native. Selon
diverses études, la composante de l’origine (amérindienne) alliée à la pauvreté
augmente le risque des femmes canadiennes à être agressées, enlevées ou
assassinées.
La cause principale de marginalisation est la délocalisation
des terres amérindiennes et la vulnérabilité économique des femmes natives, qui
aujourd’hui sont entre 44 et 47% sous le seuil de pauvreté au Canada (selon,
qu’elles vivent ou non dans une réserve). Les départs et déplacements détruisent la forme
traditionnelle de vie et ils portent préjudice à la capacité des originaires à
s’auto alimenter.
Ainsi, beaucoup de femmes se voient obligées de laisser leur
communauté d’origine – et souvent, leurs enfants – pour trouver un travail ou
continuer leurs études dans des centres urbains. De cette manière, elles laissent
aussi derrière une part de leur culture dans la lutte pour trouver dans leur
environnement un travail non lié à leurs origines et elles se voient cantonnées
à des emplois précaires, à des logements dans des zones non sûres ou marginales des villes et (elles doivent
faire face) l’inégalité et le racisme systémique forgé sur la base d’années de
politiques discriminatoires.
« Les femmes originaires représentent seulement 4%
de la population totale des femmes
canadiennes, mais selon un rapport de la CanadianFeminist Alliance for International Action, dans un cas sur dix les femmes
assassinées sont jeunes, amérindiennes et résidant dans une ville de l’ouest,
faisant que ce chiffre est significativement élevé.
Le même rapport note que les femmes originaires ont plus
de possibilité d’être assassinées que les femmes non autochtones et finalement,
que la police intervient moins fréquemment et plus tard dans les cas de femmes
amérindiennes, dont 70% des crimes restent sans être résolus. »
Les traces des politiques assimilationniste dérivés de la
colonisation européenne impliquèrent la rupture des liens familiaux, la
destruction de la culture, le départ des terres réservées ou le départ obligé
des femmes après avoir contracter un mariage, sont en relation avec l’actuelle
vulnérabilité des femmes et des enfants amérindiens, qui de nos jours doivent
faire face à des défis basiques comme la survie ou la sécurité.
La colonisation et l’« Acta India »
La coexistence
entre les peuples originaires et de la couronne britannique s’est vue
déterminée au moyen d’accords de coexistence pacifique reconnus par la loi, et
réalisés dans de présupposées conditions d’égalités à partir de 1781.
Le véritable contrôle gouvernemental sur la vie des peuples
natifs débuta en 1876, quand le gouvernement fédéral approuva l’Acta India,
établissant un statut d’infériorité sociale aux peuples originaires.
L’ « Acta India » régule presque tous les
aspects de la vie des originaires confinés à leurs réserves au sein de la
Couronne et sous la tutelle de l’Etat. Par absence de statut légal, ils eurent
des droits civils particuliers, les empêchant de voter, leur niant toute saisie
des tribunaux de justice. Ils ne pouvaient posséder ou commercer des titres de
propriété ou développer n’importe quel type d’activité commerciale ou de n’importe quelle
nature, et c’est aussi le gouvernement en dernière instance, qui décidait de
qui pouvait être considéré comme amérindien et attribué le statut comme tel.
Jusque-là, dans beaucoup des systèmes traditionnels, les
femmes profitaient d’une pleine participation à la vie familiale et au mariage,
à la politique, dans la prise de décision et la vie cultuelle.
Les lois fédérales ont introduit des changements
affaiblissant de façon discriminante les droits des femmes dans les communautés
locales, réduisant ainsi leur autonomie et leurs rôles traditionnels. Par
exemple, si une femme native épousait un homme non originaire, elle perdait son
statut et ses droits comme autochtone. Il n’en était pas ainsi dans les
mariages fait par des hommes autochtones avec des femmes non originaires.
Ou bien, si une femme épousait un homme d’un autre groupe
natif, elle perdait ses droits
comme autochtone de sa nation d’origine et se voyait rayer du présent
registre pour l’inscrire dans la nation de son mari.
L’effet et à long terme fut la réduction du nombre de
statuts autochtones, l’imposition du système patrilinéaire (1) européen et
l’élévation du pouvoir et de l’autorité des hommes en lieu et place des femmes
au sein de leurs communautés.
Le résultat fut une grave altération des systèmes familiaux
traditionnels, du lignage par descendance matrilinéaire et matriarcale, à un
lignage de résidence post-marital. De plus, personnifiant et imposant le
principe, que les femmes amérindiennes et leurs enfants, à égalité des femmes
européennes et leurs enfants, elles sont devenues elles aussi, sujets de leurs
pères et maris.
L’héritage des écoles résidentielles
A partir de 1883 le gouvernement canadien met en œuvre le
système des écoles résidentielles pour les enfants amérindiens, elles avaient
pour objectif d’éliminer la culture des peuples natifs. Entre 1883 et 1994,
plus de 150.000 filles et garçons amérindiens furent séparés de leurs familles
à partir de l’âge de 6 ans.
Tous et toutes souffrirent d’abus physiques, psychologiques,
sexuels, émotionnels et spirituels. Il est estimé que les coups corporels, la
torture physique, l’inanition (manque de nourriture), la stérilisation forcée,
l’exposition délibérées aux maladies et la négation et la négligence médicale,
furent les causes de la mort d’au moins 50.000 enfants originaires.
Qui
jamais ne retournèrent à leurs foyers
pendant que les survivants durent affronter de lourdes séquelles psychologiques
et sociales, comme les addictions, l’alcoolisme, la dépendance, la mésestime,
le suicide, la prostitution, les abus sexuels et la violence.
En plus de la perte de la culture et des valeurs
traditionnelles, se brisèrent les liens familiaux et privés avec les mères et
grand-mère natives, de leur rôle de donneuse d’affection, de maîtresses et de
guides, de la même manière, privant les filles et les garçons d’apprendre au moyen traditionnel de
l’observation et de l’ interaction avec leurs familles, sachant que le lien
affectif avait déjà disparu.
Finalement, la méconnaissance de la langue toucha la
capacité des enfants à communiquer avec leurs anciens et limitant ainsi leur
accès à des enseignements culturels et spirituels.
Dans les années 1960, les familles ont été l’objet, d’un
autre ensemble de pratiques et des politiques discriminatoires connues, comme
la « révélation sur les amérindiens des années 1960 » (The60’s Scoop). Où comment les enfants ont été retiré de leurs
familles (jusque dans les années
1980), et remis à des agences d’adoption, des
centres d’accueil, puis adoptés par des familles blanches et, ils perdirent de nouveau le contact avec leurs
communautés d’origine, qui à leur tour se retrouvèrent sans enfants.
Mobilisation sociale
Avant le manque de coordination et le manque de mesures de
la police, ce sont les organisations civiles et humanitaires, spécialement
autochtones (las indígenas),
qui ont mis en marche les recherches sur les femmes disparues (investigacionessobre las mujeres desaparecidas) - par un rapprochement et la collaboration des familles de
victimes ;
- la création de base de données pour le recouvrement
d’informations ; - des
protocoles appropriés aux résultats policiers.
Et ce, grâce à Amnesty International, qui fit connaître en
2004.cette affaire à l’opinion publique canadienne au moyen du rapport sur les
« sœurs Stolen » (StolenSisters).
Et des marches chaque 4 octobre, le jour anniversaire de la
disparition et de l’assassinat de de Gladys
Tolley, qui a eu pour résultat une certaine visibilité sur le féminicide
des amérindiennes auprès de l’opinion publique canadienne.
Et suite à la pression de la société civile sur le gouvernement fédéral, pour
qu’il agisse, et réalise une enquête pour faire la lumière sur les crimes et
promouvoir les droits à la sécurité de toutes les femmes.
Des enquêtes pour le moment, que l’administration du Premier
ministre Harper (Harpersigue siendo renuente) continuent à rechigner.
Note :
(*) Journaliste spécialisée en communication pour la construction de la
paix dans les conflits internationaux. Analyste et chercheuse à l’Observatoire
sur la couverture des Conflits à l’Université Autonome de Barcelone dans le domaine
des abus infligés aux femmes dans un contexte de haute violence et de désastres
humanitaires. Et sur les sujets
amérindiens ou autochtones, mouvements sociaux et alternatives pacifiques au
capitalisme.
(1) Patrilinéaire : « Se dit d'un mode de
filiation pour lequel seule compte la parenté paternelle. (Le nom, les
privilèges, l'appartenance à un clan ou à une classe se transmettent du père et
des parents du père aux enfants ; aucun droit n'est reconnu aux parents du côté
maternel.) ».
Source d’origine : United Explanations