aux « anarcho-syndicalistes »
de
l’entreprise SIDOR ?
Par Lionel Mesnard
Les ouvriers de la sidérurgie au Venezuela sont en grève
depuis plus de 2 semaines, pendant que la presse francophone sur le web
s’attardait sur les facéties du nouveau président Vénézuélien, Nicolas Maduro
et les divers « complots » le visant. Le mouvement social des
ouvriers du fer et de l’acier n’a pas fait l’objet d’une ligne, même si ce
sujet est d’une importance certaine.
Lire comme il est possible dans le journal "El Universal", quelques
éléments des revendications des ouvriers a quelque chose d’assez révélateur. Ce
périodique plutôt classé à droite semble plus ouvert à faire entendre les
revendications des salariés de SIDOR (entreprise nationalisée), que ne l’est en
mesure le pouvoir se réclamant par ailleurs, « de gauche et
révolutionnaire ».
Les sidérurgistes demandent que soit effectué un rattrapage
salariale, qui semble-t-il avait été promis par le défunt Hugo Chavez, il
serait de l’ordre de 147 millions de dollars (environ 100 millions d’euros)
lire ici en anglais !
Il s’agit principalement de sommes non payées depuis l’année
2008, liées à la nationalisation de l’entreprise, qui ont poussé les ouvriers
sidérurgistes à engager ce bras de fer.
Les sidérurgistes de Sidor devaient
reprendre le travail et ils semblaient vouloir accepter le rattrapage, qu’il leur avait
été proposé. Mais cette nouvelle date maintenant de 6 jours et le conflit
perdure.
Finalement des mots très durs ont été prononcés par le
président hier lors d’une allocution devant l’armée le 5 octobre :
Le président Maduro parle de SIDOR (en espagnol)
Sur la place publique, le pouvoir politique s’est révélé
d’un autoritarisme très menaçant. Voire à rendre coupables les grévistes dans
les retards de la Mission de l’Habitat
(Mision Vivienda), sauf que les logements ont de toute façon beaucoup de
mal à se construire et sont très loin des objectifs fixés.
Le président Nicolas Maduro a dit, qu’ « il
attendait « que la classe ouvrière de Sidor sans peur revienne (…) et
relance l’activité du fer et de l’acier pour la Grande Mission de l’Habitat
du Venezuela ». Il fait part d’une obstruction, qui pourrait empêcher la
construction de 300.000 logements.
En langage du pouvoir bolivarien, il s’agit
d’un « sabotage » (le énième lui aussi), et le président a été même dire
publiquement que certains syndicalistes seraient des « Narcos »
(narcotrafiquants).
Au passage, il est possible de découvrir que le général Javier
Sarmiento Márquez et Sutiss est un des négociateurs clefs dans ce conflit
social. Envoyer un militaire pour négocier (ou traquer le
narco-syndicaliste ?), donne une idée de ce mauvais parfum idéologique,
car au final, il reste des mots et des attitudes qui en disent long sur la
ligne idéologique du post-chavisme.
Si ces derniers jours, Nicolas Maduro a annoncé une nouvelle
augmentation du salaire minimum de 10% et a promis que 90% des importations ne
devraient plus avoir lieu (notamment les produits de première nécessité comme
les produits frais, les aliments).
De même, il y aurait de futures annonces sur la question des taux de change dans le pays. Un problème qui s’est avéré, non seulement être une usine à gaz avec différents cours pour la monnaie nationale, le Bolivar nouveau. Mais à surtout démontrer une incapacité de se prémunir de la spéculation avec le dollars, qui est devenu en interne un sport national face à une monnaie, qui aura été cette année dévaluée et risque de l’être de nouveau.
De même, il y aurait de futures annonces sur la question des taux de change dans le pays. Un problème qui s’est avéré, non seulement être une usine à gaz avec différents cours pour la monnaie nationale, le Bolivar nouveau. Mais à surtout démontrer une incapacité de se prémunir de la spéculation avec le dollars, qui est devenu en interne un sport national face à une monnaie, qui aura été cette année dévaluée et risque de l’être de nouveau.
Les mots du président à l’encontre des sidérurgistes ont été
d’une autre nature et toujours dans des attaques invérifiables et dans une
continuité plus que déroutante sur ceux qui de l’intérieur voudraient s’attaquer
au régime. Faudrait il s’attaquer à tous ceux qui en font leur beurre et en
particulier à cette nouvelle bourgeoisie née sous le régime de Chavez (à partir
de la prise totale de contrôle de PDVSA, la société nationale des pétroles et
hydrocarbures en 2004).
Les problèmes de fond comme la maîtrise de l’inflation,
dessert tout autant que des augmentations artificielles. Ce qui rendrait
souriant un syndicaliste européen et aiderait probablement au pouvoir d’achat
et pourrait même relancer l’économie au sein de l’UE, au Venezuela faute de pouvoir contrôler sa monnaie, il est préférable de crier au loup.
Au Venezuela, toute augmentation du salaire minimum se répercute dans la vie de
tous les jours (transport, nourriture, ...), donc au final, les 10% de Maduro reviennent à augmenter pour
augmenter, sans qu’il en sorte une ligne économique claire et surtout une
meilleure redistribution des richesses.
Si l’on essaie un peu de suivre les fantaisies langagières
du nouveau président, ancien homme lige d’Hugo Chavez, nous retombons sur le
bon vieux « complot » sommeillant du côté de l’ambassade étasunienne
de Caracas. Et Nicolas Maduro qualifiant les grévistes de SIDOR par un
néologisme ayant pour racine le mot « fasciste » et
« d’anarcho-syndicalistes populistes » sont en bonne partie les
contradictions flagrantes d’un nationalisme, qui n’a rien à voir avec une
conduite pouvant se qualifier de gauche.
Nicolas Maduro est embourbé dans ses contradictions, et
finalement, il ne se passe plus vraiment grand-chose du côté du Venezuela
socialement parlant, et fait de plus en plus penser à ce qui a conduit à la
décomposition de l’ex. Union soviétique, où la propagande n’a plus que pour
réponse la contre-propagande et pour but de planter un décor artificiel, ou
l’on traîne quelques idiots utiles sur les splendeurs d’un régime d’opérette.
Que le président vénézuélien s’en prenne à « un courant
anarcho-syndicaliste » au Venezuela a de quoi provoquer un grand éclat de
rire. S’il existe bien des racines anciennes sur la pensée anarchiste dans ce
pays et de nos jours quelques maigres troupes, voilà un langage qui en dit long
sur des réalités purement imaginaires et visant sur le fond à contrecarrer
toutes les formes de contestation à l’échelle du pays.
Il est vrai que certaines plumes du mouvement libertaire
vénézuélien sont très acides et dépeignent une situation, bien moins à l’eau de
rose que certaines gazettes néo stalinistes sur la nouvelle grande patrie du
« socialisme », et le blabla qui va avec. De toute façon, il n’y a
pas besoin d’être anarchiste ou libertaire, pour se rendre compte des contradictions
flagrantes, du double discours et à jouer les veuves et les martyrs de
l’Empire, la crédibilité est égale à zéro. Les enjeux sont ailleurs et le mot
« socialisme » sonne creux, ne résonne en fin de compte que le mot
de pouvoir.
Le PSUV, parti majoritaire à l'assemblée et les différentes régions, en oublierait qu’il est justement au pouvoir et le
gouvernement bolivarien peut ainsi continuer à rétro pédaler dans l’attente
d’une inversion des chiffres des importations. Il y aurait plutôt à investir et
dynamiser le peu d’industrie existante, et surtout mettre un frein à l’inflation
sévissant aux alentours de 30% par an.
Certes les propos de cet article ne sont pas très tendres,
mais les réalités sociales ne le sont pas non plus et ce sont les Vénézuéliens,
les premières victimes des ratés du pouvoir bolivarien. Comme l’a publié ces dernières semaines
Social Watch, le recul de la pauvreté stagne depuis 2006, et la vie quotidienne
semble se compliquer dans un pays, où déjà y vivre n’a rien d’une sinécure.
Du sol au plafond, l’appareil d’état est corrompu, tout
autant le sont ceux (classes moyennes et supérieures), spéculant sur la
monnaie, et la fausse habilité faisant de Barak Obama et de son administration
les responsables des problèmes. Après de plus de 14 ans d’un pouvoir plus
vraiment nouveau à la tête du pays, cela ne fonctionne pas ou plus.
Les pirouettes ou envolées lyriques, que pouvaient se
permettre Hugo Chavez, coup d’état oblige, Maduro, président légitime, lui ne
semble pas vraiment taillé pour le costume de l’ancien locataire du palais de
Miraflorès, sauf à répéter ce que peut lui inspirer ou souffler le régime de Raul Castro et ce que décident par ailleurs ses grands amis Chinois, ou Russes (sans oublier ses
soutiens à divers régimes dictatoriaux comme la Syrie ou la Biélorussie).
Si Nicolas Maduro veut s’en prendre aux
Etats-Unis, il lui suffit de fermer le robinet du pétrole et de rapatrier une
partie des affaires et avoirs de PDVSA de chez les « gringos », mais
il y a peu de chance que cela se réalise, sauf si ce régime tourne vers la
« logique » de ce qui se fait en Corée du Nord. C’est-à-dire ce qui se passe ici et maintenant au Venezuela, comme un
repli typiquement nationaliste et réactionnaire au sens plein du terme, ou « militaro civique » comme
il est nommé par les huiles bolivariennes.
A suivre !
A suivre !