sur
la « folie »,
après une extermination
Par Álvaro Miranda et Adriana Grosso – Notes et
traduction de Libres Amériques
La violence torture, mais la violence permanente rend
fou, comme ce qui se passe en Colombie. L’addition de tant d’années de sévices
du pouvoir avec la population la plus pauvre a provoqué chez de nombreuses
personnes des problèmes mentaux, une réalité qui a été peu observée (et surtout
peu mentionnée, mais bien connue des psychologues locaux et accompagnant ce
type de tragédie, qui ne résume pas à un cas). Les traces laissées par la
violence non seulement se calme à l’hôpital, les prisons ou les cimetières,
mais l’horreur se fixe aussi dans les esprits (ce que l’on appelle plus
communément un « traumatisme de guerre »).
L’extermination de plus de 5.000 militants de l’Union Patriotique (UP) a été l’un
des épisodes les plus cruels et violents de notre histoire et chez beaucoup de
Colombiens cela a laissé l’empreinte de faits tragiques.
Survivants ou pas, témoins oculaires ou lointains, ils vivent sans savoir pourquoi une vie grise, le produit indélébile de quelques jours qui n’ont cessé de resurgir, comme ce que vit (encore aujourd’hui) Ricardo Cheliá.
Survivants ou pas, témoins oculaires ou lointains, ils vivent sans savoir pourquoi une vie grise, le produit indélébile de quelques jours qui n’ont cessé de resurgir, comme ce que vit (encore aujourd’hui) Ricardo Cheliá.
La nuit où ils tuèrent Blanca Cecilia Palacios, elle avait
donné du lait son enfant âgé de deux mois. L’enfant avait pleuré pour des
coliques, mais il dormit un peu. Blanca était une femme en charge des travaux
de son foyer et n’avait jamais eu de relation avec la politique.
- « Je vais dormir », dira-elle à son époux Rodrigo Barrera, qui regardait
la télévision ;
- « J’ai mal à la tête ». Elle se passa la main sur son front, là où se
trouvait sa douleur, le même endroit où quelques heures plus tard, à 2h45 du
matin, elle reçue un tir mortel.
Lors de cette nuit seulement le silence s’entendzit, il
s’était emparé du quartier populaire « Los Comuneros », dans la
commune de Fusagasugá, à deux heures de Bogotá, la capitale de la Colombie.
Puis soudainement, il fut possible d’entendre les moteurs de deux camionnettes
et les bruits de bottes que donnèrent de 30 militaires en descendant de
celles-ci.
Quelques témoins qui avaient entendu leur arrivée, purent
voir ainsi comment des hommes avaient transporté deux cadavres. Deux personnes
sans vie, qui juste quelques minutes auparavant avaient été éliminées sans
aucune décision de justice, et les corps comme telles étaient une gêne pour
eux, ils les déposèrent à l’entrée de la maison, qu’ils allaient maintenant assaillir.
Dans un style commando, ils entourèrent la petite maison et d’un coup, ils
firent tomber la porte d’entrée.
Puis s’entendirent des cris :
- A l’étage - hurla le sous-lieutenenat Cruz -, qui effectua
l’opération et une violation illégale du domicile. Le sergent Ramírez et le
reste du personnel qui l’accompagnait ajustèrent leurs armes sur la famille.
- A l’étage – le sous-officier revint - la famille fut obligée de s’allonger
face contre le sol. Les hommes de la maison étaient quasiment nus, avec un
simple pantalon de pyjama, qu’ils utilisaient pour dormir. Les victimes
n’avaient aucune arme sous la main dans leur domicile. Malgré cet état de
faiblesse commença l’exécution.
Il ne s’agissait pas d’une exécution contre un mur, sinon
d’être à même le sol. Le premier à mourir fut Antonio Palacios Urreaun, un
humble travailleur de 65 ans, chef de famille, et que ses assassins accusèrent
d’être un sympathisant de l’Union Patriotique (UP), un parti légal de la gauche
colombienne, qui s’était constitué avec des intellectuels, des enseignants, des
syndicalistes et des travailleurs, ayant pour objectif concret : la
recherche de la paix en Colombie.
Suivit l’immolation des trois fils d’Antonio, qui dormaient
dans des pièces attenantes : Camilo, un étudiant en mathématique de 27 ans,
Janeth, 19 ans, et Blanca Cecilia 17 ans, qui fut prise de panique, quand elle
vit tombé le corps de son époux Rodrigo Barrera. Elle pris son fils dans ses
bras et chercha une sortie par laquelle elle pouvait sauver sa vie et celle de
son nouveau-né.
L’enfant se mit à pleurer à la brusque détonation des tirs.
La jeune femme chercha à faire quelques pas. Une balle dans sa tête la renversa
à terre devant sa mère, qui la fixa sans pouvoir rien faire, seulement ouvrir
ses bras aux deux enfants du foyer qui avaient survécu au massacre.
Vingt ans après de cette obscure nuit du 21 août 1991, un
des témoins, Monsieur Ricardo Cheliá, se trouvait sur un banc du Parc central
de Fusagasugá. Il prenait le frais. Ses souvenirs au fil du temps se sont
transmis à tout son épiderme, se plissant (à l’idée ou l’évocation) de son
récit obscur et bref, et de ses cheveux se cachant sous sa casquette noire.
Ricardo devint un homme de plus, de ceux, - qui, depuis -,
n’ont ni nord, ni sud, sauf à revivre les centaines de possibilités de
désastres de cette guerre politique, qui a commencé en Colombie après
l’assassinat de Jorge Eliécer Gaitán, le 9 avril 1948, en la dénommée rue Real
de Bogotá.
« J’ai mal à la tête », répétait Ricardo Cheliá, ce qu’avait dit Blanca
Cecilia Palacios avant d’aller voir une dernière fois son enfant de deux mois, la
même plainte, qui avait cette nuit-là
précédée sa mort. C’était comme si cette phrase tissait un lien
invisible entre la tragédie de cette année (1991) et le mélange de ses jours,
semaines et des mois de souvenirs, que vivait Ricardo dans son présent de 2013.
La mort de Blanca Cecilia Palacios, de ses frères et de son
père, s’était transformée pour Ricardo en un référent, qui chaque fois
jalonnait son histoire. Au milieu des années 1950, quand il était petit, il a
dû fuir sa maison incendiée par les ennemis politiques de son père, un émigrant
arabe, qui était venu en Colombie s’aventurer à la campagne, pour écraser de la
canne à sucre et produire cette grande douceur s’appelant la
« Panela » (sorte de pain de sucre ocre servant à la préparation de
boissons sucrées chaudes et froides).
Ricardo Cheliá arrivant sur ses 66 ans et autres
histoires
A la fois, beaucoup de personnes
ne connaissent rien, ni un mort, ni la furie politique vécue dans le pays,
d’autres ont encore présent à l’esprit l’assassinat de quelqu’un de connu, de
quelques familiers. Il est curieux comme dans la région de Fusagasugá, située
dans le Parc National de Sumapaz, centre d’activité de la guérilla, ces récits
de vies ont des liens avec beaucoup d’autres meurtres. A tuer - pour tuer -,
depuis le début il en retourne une affaire promue par l’Etat, les particuliers,
les groupes organisés, les corporations d’éleveurs, les commerçants et les tueurs à gages.
Frapper à la porte de n’importe quelle maison et trier pour
assassiner n’a pas été seulement l’affaire de la famille de Blanca Cecilia
Palacios. Il s’agit d’une affaire ayant laissé une blessure ouverte pour des
millions de douleur et à différents niveaux de criminalité (et de
responsabilité criminelle).
La famille Palacios, de l’U.P, a été accusé d’appartenir au
groupe armé des FARC, sans l’être.
La presse nationale a enregistré que pour l’année 1991, ce
type de situation s’était déroulé beaucoup de fois, lorsque des militaires
préparèrent pour scénario de provoquer une fausse culpabilité, sur des actions
jamais commises par les victimes accusées d’appartenir à des groupes hors la
loi.
Ce fut plus tardivement que l’on les nomma les « faux-positifs » (notamment à partir de 2008 et ce que
l’on nomme plus exactement des exécutions extra judiciaire), c’est-à-dire,
réaliser l’assassinat d’innocents pour toucher une prime officielle en argent,
et recevoir des médailles pour en avoir fini avec ce qu’ils désignèrent comme
des personnes « dangereuses ». (si le nombre d’exécution extra
judiciaire a fortement baissé depuis l’arrivée en 2010 de Juan Manuel Santos,
toutefois la pratique n’a pas complètement disparu)
Pendant que Ricardo Cheliá assis sur le banc du parc voyait
voltiger en cercle cent colombes en fuites, il se rappelait à voix haute,
comment la 13° Brigade de l’armée, en un communiqué fait par le commandant de
cette unité militaire, déclarait qu’ils en avaient fini avec les activistes du Front
N°15 des FARC. Selon le communiqué, les troupes officielles, auraient reçu des
coups de feux des « subversifs », et qu’à ce moment, ils se
trouvaient dans la maison.
La population de Fusagasugá laissait s’écouler les jours au
gré d’une continuité, cultiver des fleurs, planter du café, récolter des
haricots et des fruits tropicaux comme les mangues ou les mandarines. Les
voisins du quartier « Los Comuneros » ne surent jamais comment avait
été justifié par l’Etat le massacre des voisins et amis innocents. Les
coupables, 19 mois après, furent condamnés à la prison.
Le regard que Ricardo Cheliá conserve sur le massacre de
Fusagasugá était le résumé de centaines d’autres coorespondant à ce que vit
le pays, et cela fait depuis plus
de 60 années ininterrompues. L’homme du banc du parc, à la casquette noires,
est un être perdu dans un fatras d’épisodes que lui, dans la simplicité de sa
vie, ne peut saisir. Il existe un énorme tissu de tragédies, que le descendant
des Arabes, aperçue à peine comme les roues libres du destin.
La figure de la violence a d’énormes proportions, qui
jusqu’à présent l’histoire est venue s’entrechoquant avec la mémoire à travers
des publications écrites, la radio ou la télévision. Cheliá, comme des millions
de Colombiens, il navigue à vue au milieu de personnes de toutes conditions,
qui ont été des acteurs ou pas du processus né du désir de participer
politiquement en paix, comme l’était la proposition de l’Union Patriotique.
Il s’agissait de lutteurs sociaux qui venaient d’organisations
légales de gauche comme, par exemple, Leonardo Posada, représentant à la
Chambre, un jeune avocat qui voulait lire tous les romans du monde, et qui a
été assassiné en 1986 dans la ville pétrolière de Bucaramanga avant de pouvoir
se mettre à son compte.
En janvier de la même année, ce fut le tour tragique de
Gildardo Castaño Orozco, responsable syndical et conseiller de la ville de
Pereira, qui fut victime d’un attentat criminel réalisé en moto par des
sicaires, tout près de sa maison.
En octobre 1987 le candidat à la présidence de l’année
précédente pour l’U.P, Jaime Pardo Leal, après avoir parlé avec un plombier
pour qu’il règle la pression de l’eau de sa petite maison de campagne, a été
assassiné sur la route en direction de la capitale, devant le regard de sa
femme et ses fils.
Le 3 mars 1989 les balles tombèrent sur sa frêle humanité de
José Antequera, avocat, danseur de musiques de la Caraïbe, le dirigeant de la
Jeunesse Communiste, a été assassiné dans le même aéroport, celui de Bogotá,
quand il saluait le Libéral en pré campagne, Ernesto Samper, qui fut gravement
blessé.
Le 22 mars 1990 Bernardo Jaramillo Ossa a été assassiné dans
le même terminal aérien de Bogotá, pendant qu’il attendait son vol, accompagné
de son épouse. Ce jour, un jeune sicaire (ou tueur à gage) sort une
mitraillette (Mini Igram 380) et tira contre le candidat à la présidence de
l’Union Patriotique, qui n’avait pas douté pour continuer avec l’organisation
que Pardo Leal avait dirigé juste un an au moment d’être assassiné. Les
dernières paroles de Jaramillo Ossa, qui était blessé dans les bras de son
épouse, furent : « Mon amour, je ne sens plus les jambes. Ces fils de pute
m’ont tué, je vais mourir. Embrasse-moi et protège-moi ».
La mort semblait avoir été montée comme un manège qui ne se
fatigue pas de réaliser ses tours sanglants. A chaque fois, les promoteurs
étaient des membres des forces de sécurité de l’Etat, comme dans le cas de la
famille de Blanca Cecilia Palacio, ou des criminels des Autodéfenses de
l’extrême droite convertis en narcotrafiquants.
Ricardo Cheliá, comme des milliers de colombiens dans
la moyenne, il ressentait dans sa
vie une étrange sensation qu’il ne pouvait expliquer, mais qui se manifestait
comme un agir cruel et systématique. Pour ceux qui peuvent l’exprimer, c’était
comme si en permanence ils vivaient sur un baril de poudre. Quiconque, ou
aucune personne ne pouvait savoir où et quand il était possible sortir (...).
Malgré le souci des crimes sélectifs, des voitures piégées dans les rues, les
immeubles et les centres commerciaux, la vie s’impose en Colombie.
Pour les centaines d’hommes et de femmes comme Cheliá,
l’existence est reliée à une lignée de mort au milieu de l’agitation
quotidienne des magasins de commerce, écoles, hôpitaux, places de marché,
autobus, églises ou restaurants. Un, deux, des centaines, des milliers de morts
ont eu la « chance », d’être retrouvés, là où des milliers se perdent
dans les campagnes et forêts au fond d’une fosse commune.
Des cas, il existe des cas entre tous les cas. Un exemple
pris au hasard est celui d’Ana Fabricia Córdoba, militante de l’U.P, pour
laquelle correspond d’avoir vécu toutes les violences s’étant produites en
Colombie.
Pareillement que Cheliá, quand petite, elle fut expulsée de
sa terre natale en raison de l’affrontement des deux partis traditionnels, les
paramilitaires tuèrent son époux l’année 2000, pour son appartenance à l’U.P,
et elle a eu à retrouver le cadavre de son fils Johnatan, après avoir été
criblé de balles dans les rues de Medellín. Elle et son ami ont été tués par la
patrouille n°301384 de la police. Ainsi à neuf heures du soir, Johnatan appela
Ana Fabricia, sa mère. Elle raconta : « Il était tétanisé par la peur et
il m’a dit qu’ils allaient le tuer ».
Le jour suivant, les deux jeunes réapparaissent morts. Pour la responsable Ana Fabricia, à
l’égal de Blanca Cecilia, un homme à briser sa vie d’un tir dans sa tête en
juin 2011, la même semaine pendant laquelle, le président Juan Manuel Santos se
prononça pour la Loi des « Victimes » (du conflit armé).
Le soleil de Fusagasugá était d’une chaleur douce au moment
où Ricardo Cheliá entra dans un mutisme total. Il se réfugia dans ses pensées
avec un regard fixe, duquel il ne voyait pas les vendeurs ambulants de glaces
et de ballons gonflés. Il écoutait seulement et entendait les colombes grises
qui picotaient ou déployaient leurs ailes, les transportant d’un lieu à l’autre
du parc.
- Ainsi elles volèrent toutes – dira-t-il, regardant les
petits oiseaux faisant un large vol pour se rendre sur un espace se tenant sur
un côté de l’église aux deux tours de Notre Dame de Belén (en photo ci-dessus), et sur ses autres
côtés, le Centre administratif Municipal, les banques, les joailleries, les
papeteries ou les cafetiers.
Chelíá avait
vécu les exodes pendant l’enfance dans la ferme de son père et après, de part
les divers endroits où elle allait pour chercher de quoi faire. La Colombe,
pour le descendant de l’émigrant arabe, était un pays de nomades, de déplacés
par la violence.
- Mon père a dû laisser son travail à la campagne devant les
pressions, lors des quelques années du gouvernement du dictateur Rojas Pinilla.
(1953-1957)
Maintenant la situation reste similaire, mais avec des
variantes sur les signalements qui parviennent de la violence. A la moitié du
vingtième siècle, Cheliá aurait été une victime innocente de l’affrontement
partisan entre les conservateurs (bannière bleue comme symbole héraldique) et
les libéraux (bannière rouge comme symbole héraldique).
A partir des années 1980, ce fut au tour du conflit pour la
terre, mais avec des conséquences politiques entre les secteurs radicaux en
arme, qui sélectionnaient leurs victimes dans les villes et les campagnes.
Les membres de l’U.P. et d’autres organisations syndicales
et démocratiques commencèrent à quitter le pays devant le risque de se faire
tuer. La fatalité - pour qui pensait différemment – ont continué jusque dans
les années 1990. Non, il n’y avait pas de reste, sinon à chaque attentat, une
addition : Huit sénateurs, 13 députés, 70 conseillers et 11 maires de l’U.P.
assassinés. Au total, plus de 5 000 militants et sympathisants morts,
c’est-à-dire, la fin de l’organisation.
- Sait-il pourquoi il porte des vêtements noirs ? - Demande
Cheliá sans perdre pour cela son regard d’oiseau endeuillé – Parce que dans ce
pays, il y a eu beaucoup de mort par la faute de cette guerre.
4 ou 5 générations de colombiens n’ont pas pu vivre une
année de paix depuis 1931 à 1939 quand il s’est déroulé à Guaca et à Capitanejo
(localités du département du Santander, nord de la Colombie), les prémices du
conflit avec l’extermination de la population conservatrice et libérale,
faisant des massacres politiques, l’étincelle qui s’est enracinée depuis lors.
La seule statistique récente datant de 1985 et divulguée est terrifiante.
Ricardo sait que depuis beaucoup d’années, que quelque chose
va mal, mais pareillement que beaucoup de colombiens ne pouvant préciser les causes et apporter des
solutions, et considérant que cet état d’altération s’achèvera, avec la paix au
quotidien et le droit à la vie comme éléments connaturels (qui est
naturellement en accord avec une autre chose).
Chez le kiosquier près du supermarché, sous la main de
quiconque, apparaît l’hebdomadaire « Semana ». La publication sort
tous les 7 jours avec un tirage prometteur de 52.800 exemplaires et une des
meilleures diffusions dans le pays. La Colombe s’approche des 50 millions
d’habitants et, cependant le niveau de lecture de la presse n’est pas
généralisé. Seuls lisent les catégories de la population de haut niveau,
intellectuels et professeurs intéressés par l’économie, la politique et la vie
en rose.
Des personnes comme Cheliá ne connaissent pas l’existence de
cet hebdomadaire, parce qu’ils ne vont pas au supermarché, comme d’autres
visitent les nommées centres d’esthétique ou de coiffures pour se faire couper
les cheveux. Ce sont dans ces lieux où en général le commun des mortels peut
jeter un œil aux nouvelles.
Selon l’hebdomadaire Semana, depuis 1985, au 31 mars de cette
année-là, il a été comptabilisé 5.405.629 victimes de violence.
Blanca Cecilia Palacios fait partie de la statistique des
2.683.335 femmes concernées par cette violence.
Son père et ses frères sont de ce tragique compte :
Syndicalistes assassinés entre 1978 et 2012 : 2.994.
Défenseurs des droits : 299.
2.087 massacres entre 1983 et 2011, 9.509 personnes ont été
assassinées.
Journalistes assassinés depuis 1977: 137.
Les enlèvements pour extorsion de fonds entre 1996 et 2002
ont été de 16.123.
Les colombiens qui sortirent du pays pour des raisons de
guerre : 395.577.
Fonctionnaires, employés ou candidats publics
assassinés : plus de 3.000.
Personnes qui ont souffert d’un déplacement forcé depuis
1985 : 4 ou 5 millions. (plus de 6 millions selon le Movice)
Personnes touchées par las mines antipersonnelles : 10.272.
Amérindiens assassinés : 2.628.
Tous ces actes violents de la guerre agissant comme des
tsunamis ont en continus d’autres mouvements de vague de moindre hauteur, mais
pas moins dangereux. Blanca Cecilia Palacios a été une victime des très
nombreux tsunamis continuant à se suivre. Ses voisins, les survivants, sous une
autre forme, ils continuent de vivre éclaboussés par les innombrables gouttes
de sang qui proviennent de leur existence, de leur pensée, de leur manière
d’agir ou de se taire.
Cheliá s’est relevé de son banc du Parc. Il chemine entre
les centaines de colombes, lui donnant juste le pas par un petit sautillement.
Il ne s’est pas où aller. Finalement, avant que la guerre ne trouve sa fin,
elle ne montre toujours pas sous le destin de la paix.