lundi 7 octobre 2013

Equateur, la diffamation est-elle sanctionnable sur Internet ?

Les injures 
sur les réseaux sociaux 
pourraient être sanctionnées



Par l'Association for Progressive Communications - Traduction de Henri Dumoulin

“J'ai proposé une régulation de tous les faits de  calomnie sur les réseaux sociaux parce que ceux ci ne doivent pas demeurer des espaces d'impunité. J'ai demandé au service de la Justice d'envisager une procédure spéciale pour les injures sur Twitter ou Facebook parce qu'aujourd'hui une injure contre une personne qui est suivie par 10 000 autres peut produire des effets très rapides et désastreux” a déclaré M. Mera fin août (1). Plus récemment, un parlementaire, Mauro Andino (2) a déclaré que l'on était en train de chercher la façon de mettre en pratique cette mesure, car il est “très compliqué” d'identifier les personnes physiques derrière différents comptes Internet. 

Monsieur Mera - Equateur
Une des options à l'étude est l'installation obligatoire de caméras de surveillance dans les cybercafés. Ceci, non pas pour attenter à la vie privée de chacun, ou contrôler les réseaux sociaux, mais pour pouvoir identifier les délinquants.

Cette mesure va pourtant à l'encontre des recommandations des organismes internationaux de défense des droits de l'homme et constitue une menace pour la liberté d'expression des Equatoriens.

Plusieurs organisations de la société civile équatorienne ou internationale ont rejeté cette proposition en insistant sur le fait que les droits de la personne en dehors d'Internet sont les mêmes que lorsqu'elle est en ligne, et que l'expression sur les réseaux sociaux ne doit pas être abordée de façon différente. 

Frank La Rue, rapporteur spécial de l'ONU pour la promotion et la protection des droits à la liberté d'opinion et d'expression, a indiqué à plusieurs reprises que compte tenu du caractère particulier d'Internet, une série de règlements ou restrictions pouvant être considérés comme légitimes et adaptés au cas particulier des moyens de communication traditionnels, ne le sont plus du tout ici. 

Il a rappelé également plusieurs fois que “la diffamation devait être dépénalisée”. Les promoteurs de cette réforme  font exactement le contraire.

Les moyens qui seraient utilisés pour sa mise en place (en particulier imposer une surveillance vidéo dans les cybercafés), ont un impact élevé sur la liberté d'expression et le respect de la vie privée des citoyens et citoyennes.

D'une part, ils vont contre le principe de nécessité et proportionnalité consacré par le droit international pour la restriction de la liberté d'expression, d'autre part ils accordent des pouvoirs de contrôle à des entreprises privées comme les cybercafés (et bien que cela ne soit pas mentionné, probablement aux fournisseurs de services Internet), faisant fi des garanties légales auquelles a droit chaque citoyen en dehors d'Internet. 

Ce qu'on se prépare à mettre en place en Equateur va décourager le débat public et se traduira en pratique par une autocensure, phénomène hautement nocif pour la démocratie.



Notes :

 

(1) Le gouvernement demande que soit pénalisé les opinions sur les réseaux sociaux (en espagnol), cliquez ici !

 

(2) Entretien avec Mauro Andino sur le code pénal équatorien et les injures, (en espagnol) cliquez ici !

 

Source : Global Voices