L'avocat André Michel
arrêté abusivement et libéré
par un un élan de solidarité
Par Alter-Presse et Libres Amériques
L’avocat André Michel, opposé comme partie civile dans une affaire de corruption liée à la famille du président haïtien, André Martely, a été arrêté mardi 22 octobre 2013 en soirée, du coté de Martissant à Port-au-Prince. Me Michel qui s’était enfermé dans sa voiture, a été ensuite conduit au sous-commissariat de Martissant. Cela a donné lieu à des manifestations et une mobilisation à la fois populaire et avec l'appui de confères et d'élus déterminés à ne pas laisser Maître Michel victime d'un contrôle judiciaire abusif et à caractère politique.
Sur place sont venus, le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Port-au-Prince et des avocats du chef de file du groupe 77, notamment Me Samuel Madistin. Ils n'ont pu voir leur client.
De nombreux citoyens de Martissant se sont rapidement massés devant le sous-commissariat où ils ont manifesté contre cette arrestation jugée arbitraire et qualifiée de politique. Sous cette pression l'avocat a pu être libéré mercredi 23 octobre en trouvant ainsi un soutien auprès de sénateurs, mettant M° André Michel (en photo) "sous le contrôle de la République", selon Alter-Presse Haïti.
Maître André Michel hors du tribunal, suite à l’action d’un groupe d’avocats de la capitale
Des avocats se sont saisis de Me André Michel, en début d’après-midi de ce mercredi 23 octobre 2013 et l’ont conduit de force au bâtonnat, défiant les autorités judiciaires de venir l’y chercher, constate AlterPresse. André Michel se trouvait depuis la matinée au greffe du parquet de Port-au-Prince suite a son interpellation la veille.
Le commissaire du gouvernement, près le tribunal civil de Port-au-Prince, Francisco René, qui devait l’entendre, ne s’est présenté qu’à 12 heures (locales). Cerné par une foule de partisans d’André Michel, il a eu du mal à quitter son véhicule.(...)
Cette dernière information a, tout de suite, fait régner une vive tension au tribunal, alors que des avocats ont emmené de force André Michel au local du bâtonnat. Des affrontements ont éclaté entre manifestants et forces de l’ordre devant le local du parquet.
Trois sénateurs, Francky Exius (Sud), Jean Baptiste Bien-Aimé (Nord-Est) et Westner Polycarpe (Nord) ont quitté une rencontre de la chambre haute pour se rendre sur les lieux. Le député Arnel Belizaire a débarqué, lui aussi, à la tête d’une manifestation. (...)
Des étudiants et d’autres citoyens ont entamé un mouvement de
protestation contre l’arrestation de Michel, mouvement que la police a
tenté d’écraser brutalement à coup de gaz lacrymogènes. André Michel est un opposant à l’administration de Michel Martelly.
Il a déjà échappé, en aout 2013, à une tentative d’arrestation par le
juge d’instruction Lamarre Bélizaire.
André Michel : Une guerre des pouvoirs, entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire ?
Il a
fallu que des avocats du barreau de Port-au-Prince, puis des sénateurs
de la république, utilisent la force pour sortir le jeune avocat, André
Michel, des tentacules du juge instructeur Lamarre Bélizaire, alors que
l’un des substituts du commissaire du gouvernement, près le tribunal
civil de Port-au-Prince, a constaté qu’aucune charge n’a été retenue
contre l’opposant du régime en place, relève l’agence en ligne
AlterPresse.
Tout de suite après la libération de Michel, un ordre de dépôt, émané
du juge Bélizaire, à la réputation plutôt proche du palais national, a
été déjà en route contre l’avocat.
Toute une mise en scène (chaîne d’union, sirènes, accompagnement de
la population) a été organisée, par confrères, sénateurs, députés et
sympathisants, pour sécuriser Me. Michel qui allait être transporté dans
la salle de séance du sénat de la république, flanqué de son bâtonnier
Carlos Hercule.
Me. André Michel est désormais en sécurité, sous le contrôle du sénat
de la république, confie le sénateur François Annick Joseph dans la
presse. Une situation qui rappelle le cas du député Arnel Bélizaire, ramené
au parlement, le 28 octobre 2011, après son arrestation « illégale et
arbitraire » du 27 octobre 2011 ordonnée par le même exécutif.
Une nouvelle fois, après la tentative du mois d’août 2013, Lamarre
Bélizaire aura raté une « belle occasion » pour « régler son compte à
l’avocat André Michel, qui a eu le courage de dénoncer la corruption et
les agissements peu corrects de son patron [celui de Bélizaire] du
palais national », commente un avocat du barreau de Port-au-Prince, venu
se solidariser avec son collègue Michel, au parquet prés le tribunal
civil de la capitale, ce 23 octobre 2013.
Est-ce une façon pour les sénateurs et les députés, à la base de ce
mouvement de force, de montrer à l’exécutif que tous les moyens sont
possibles pour freiner des dérives ? Est-ce une réplique, pratique, à une autre arrogance de la présidence
qui semble croire que le pouvoir exécutif dominerait les autres
pouvoirs ?
Est-ce une façon originale de montrer que le pouvoir arrête le pouvoir en Haïti ?
Autant de questions que soulève, dans certaines têtes, l’affaire
André Michel, désormais célèbre pour avoir tenu tête à l’autoritarisme
et autres abus de pouvoir... Un apparent contrôle anodin d’un véhicule, qui mène à une paradoxale arrestation d’un passager, au lieu du chauffeur…
Et si c’était un plan bien concocté, à la sauce rose, pour faire
ombre au dossier des millions de dollars américains trouvés, au Surinam,
dans une valise d’un haut fonctionnaire haïtien du service de
l’immigration et de l’émigration et à celui du prétendu complot de
l’assassinat du journaliste Jean Monard Métellus, découvert par le
ministère de la justice, lequel n’a pourtant procédé à aucune
arrestation ?
Encore une interrogation d’un militant du mouvement social haïtien, requérant l’anonymat.
En tout cas, le dossier d’André Michel met encore une fois à nu les
faiblesses et la possible instrumentalisation de la justice haïtienne. Et les mouvements de protestation contre un exécutif - « qui a réussi
à faire tous les mauvais coups pour se discréditer et s’enfoncer
davantage dans la fange » - ne font que gagner en ampleur.
Le Champ de Mars, grande place publique à proximité des ruines du
palais présidentiel, en particulier, et le centre-ville de
Port-au-Prince, en général, ont été le théâtre d’échanges de gaz
lacrymogènes et de jets de pierres entre le corps d’intervention et de
maintien d’ordre (Cimo) de la police nationale d’Haïti (Pnh) et des
étudiantes et étudiants supportant André Michel.
Même réalité de protestation dans des quartiers populaires, ce 23
octobre, au Cap-Haïtien (deuxième ville du pays, à 248 km au nord de la
capitale), après l’effervescence de Martissant (périphérie sud de
Port-au-Prince) au fort de la tentative d’arrestation de Me. André
Michel, farouche opposant à l’actuelle administration politique. (...)
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Sources : Alter-Presse