jeudi 26 septembre 2013

Chili, vers un changement du mode des élections nationales

QUARANTE ANS 
SANS OUBLI 
POSSIBLE…

Par Vudeloin

Depuis que deux avions détournés par des militants d’Al Qaeda ont heurté de plein fouet les Twin Towers du World Trade Center, ce jour est le symbole toujours vivace de l’affrontement entre les sociétés occidentales civilisées et l’islamisme fanatique militant et terroriste… Mais le 11 septembre est aussi le jour de la fête « nationale » de la Catalogne, consacrant la prise de Barcelone par les troupes françaises au terme ultime de la Guerre de Succession d’Espagne. Et surtout, depuis quarante ans, le 11 septembre est la date anniversaire du coup d’Etat fomenté par l’armée chilienne contre le Gouvernement d’Unité Populaire de Salvador Allende.

Le pays a d’ailleurs connu une vive controverse ces dernières semaines, en pleine campagne électorale, sur le sens à donner aux manifestations diverses marquant le quarantième anniversaire du « golpe de Estado ». Il est en effet évident, pour les partis de la gauche chilienne, qu’il est impossible d’oublier quoique ce soit de ce qui s’est passé alors.

Ainsi, l’ancien Président Ricardo Lagos a dit « Au Chili, la dictature militaire nous a pris le meilleur de nos vies », pendant les dix sept années (de 1973 à 1990) qu’a duré le régime Pinochet. Guillermo Teillier, député et Président du PC Chilien, a indiqué pour sa part « Nous ne renoncerons pas à la justice ni à la vérité. »

Pour sa part, l’UDI, le parti des anciens pinochétistes et de leurs enfants (comme nous avons déjà eu l’occasion de l’indiquer) a préféré « donner un signe d’unité nationale » en commandant une …messe dans la Chapelle du Parlement…Et ce, pour que l’unité prenne le pas sur toute exploitation politique de l’événement et toute « relecture historique » qui serait malhonnête.

Carlos Larrain, sénateur et Président du Parti RN, celui de la droite new-look version bizness, a précisé, en parlant du 11 septembre, qu’il n’y « avait ni purs innocents ni purs coupables » dans cette affaire.

Il a invité ensuite « à se garder de juger la situation du pays en 1973 dans l’abstrait, et de se souvenir du contexte de l’époque, » Il a ainsi indiqué qu’à son avis « le risque totalitaire avait été écarté et que le Chili avait pu éviter de devenir Cuba… » (sic).

On voit que l’interprétation des faits historiques est un exercice encore complexe au Chili, même si l’une des forces politiques (la DC d’Eduardo Frei) qui soutint le coup d’Etat est aujourd’hui partie intégrante de la Concertacion des forces de gauche…

La journée de commémoration de l’événement a d’ailleurs été marquée par des incidents assez sérieux dans plusieurs villes (Puente Alto, San Bernardo, Concepcion).

Il semble toutefois qu’il y ait un domaine dans lequel un large accord pourrait intervenir, à l’exception notable de l’UDI, attachée à la défense de l’héritage du régime Pinochet.

C’est celui de la modification du mode de scrutin et l’abandon de l’ahurissant système binominal pour une proportionnelle un peu plus conforme aux canons habituels de ce genre de système électoral.

Vidéo sur le SYSTêME BINOMINAL (en espagnol sous- titré en français)

La discussion actuelle sur le mode de scrutin s’appuie sur plusieurs propositions, certaines préservant le nombre des élus actuels (120) dans un découpage un peu différent, et d’autres prévoyant un accroissement du nombre des élus des deux Assemblées.

Premier projet : il s’agirait de fondre les soixante circonscriptions actuelles élisant chacune deux élus en trente – quatre entités pourvues de deux à huit élus.

Ce qui donnerait les résultats suivants : 

1er district : Région XV (Arica), deux élus 2e district :Région I (Iquique), deux élus 3e district : Région II (Antofagasta), quatre élus 4e district : Région III (Atacama), quatre élus 5e district : Région IV(Coquimbo), six élus 6e district : Région V (Petorca, Quillota, Los Andes, San Felipe, Marga Marga), six élus 7e district : Région V (Valparaíso, San Antonio), six élus 8e district : Région métropolitaine (Chacabuco, Quilicura, Pudahuel), deux élus 9e district : Région métropolitaine (Conchali, Renca, Huechuraba, Cerro Navia, Lo Prado et Quinta Normal), quatre élus 10e district : Région métropolitaine (Estacion Central, Cerrillos, Maipu), deux députés 11e district : Région métropolitaine (Recoleta, Independencia, Santiago), quatre députés 12e district : Région métropolitaine (Melipilla, Maipo et Talagante), quatre députés 13e district : Région métropolitaine (Las Condes, Lo Barnechea, Vitacura, Nunoa, Provindencia), quatre députés. 14E district : Région métropolitaine (La Reina, Penalolen), deux élus 15e district : Région métropolitaine (Macul, San Joaquin, La Granja, La Florida), quatre élus 16e district : Région métropolitaine (Lo Espejo, El Bosque, La Cisterna, San Ramon, Pedro Aguirre Cerda, San Miguel), quatre élus 17e district : Région métropolitaine (Puente Alto, Pirqué, San José de Maipo, La Pintana), deux députés. 18E district : Région VI – O’Higgins (Rancagua), quatre députés 19e district : Région VI – O’Higgins (Cardenal Caro et Colchagua), quatre élus 20e district : Région VII – del Maule (Curico), deux députés 21e district : Région VII – del Maule (Talca), quatre élus 22e district : Région VII – del Maule (Cauquenes, Linares), quatre élus 23e district : Région VIII – du Bio Bio (partie Nuble), deux élus 24e district : Région VIII – du Bio Bio (Concepcion), quatre élus 25e district : Région VIII – de Bio Bio (Coronel), deux élus 26e district : Région VIII – de Bio Bio (Chillan), deux élus 27e district : Région VIII – du Bio Bio (Arauco, Bio Bio), quatre élus 28e district : Région IX – Araucanie (Malleco), quatre élus 29e district : Région IX – Araucanie (Temuco), deux élus 30e district : Région IX – Araucanie (Cautin), quatre élus 31e district : Région XIV – Los Rios, quatre élus 32e district : Région X – Los Lagos, huit élus 33e district : Région XI – Aysen General Carlos Ibanez del Campo, deux élus 34e district : Région XII – Magellan, deux élus.

Dans les faits, comme le scrutin est proportionnel, la règle des deux tiers/un tiers jouerait encore dans les circonscriptions comptant deux élus, mais moins dans les autres.

A quatre élus, une liste dépassant les 60 % obtiendrait trois sièges sur quatre ; à six élus, une liste dépassant 57,5 % pourrait obtenir quatre des six mandats et à huit élus, une liste dépassant les 55 % pourrait décrocher cinq mandats sur huit.

Complétant ce projet, il existe également une réforme limitée du Sénat qui prévoit d’une part la création de six sièges, avec un Sénat passant de 38 à 44 élus, par deux sièges pour la région XV (Arica) qui en est pour l’heure dépourvue et quatre sièges de plus pour la région Métropolitaine de Santiago.

Par ailleurs, le Sénat serait élu sur la base de circonscriptions recouvrant les Régions, ce qui fait que les plus peuplées (Valparaiso, Maule, Bio Bio, Araucania et Métropolitaine) éliraient quatre à huit sénateurs avec les mêmes modifications de majorité que celles possibles pour les députés.

Un autre projet, signé par des députés de sensibilités diverses (autant du PS que de la RN), préconise de porter à 150 le nombre des députés et à 50 celui des sénateurs.

Pour les députés, le principe retenu est d’accorder au moins trois députés à chaque région, indépendamment de sa population. Puis de répartir les autres sièges, c’est-à-dire 105 mandats à raison de la démographie.

Dans les faits, les régions XV (Arica), I (Iquique), XI (Aysen) et XII (Magellan) auraient trois élus. Puis les régions III (Atacama) et XIV (Los Rios) en auraient quatre. Ensuite, la région II (Antofagasta) passerait à cinq sièges, la région IV (Coquimbo) resterait à six sièges ; les régions VI (O’Higgins) et X (Los Lagos) resteraient à huit sièges ; les régions VII (Maule) et IX (Araucania) conserveraient leurs dix élus. Par contre, la région V (Valparaiso) passerait à seize élus, la région VIII (Bio Bio) à dix – huit sièges et la région Métropolitaine à quarante – neuf. 

La région V serait partagée en deux circonscriptions élisant chacune huit députés, la région VI serait découpée en deux, avec quatre députés à élire à la clé dans chaque cas ; la région VII aurait deux circonscriptions de six et quatre élus ; la région VIII serait découpée en trois parties élisant huit, cinq et cinq députés ; la région IX aurait deux circonscriptions de quatre et six élus ; et la région Métropolitaine serait découpée en huit circonscriptions élisant de cinq à sept députés. De fait, les régions I à IV, X à XII, XIV et XV constitueraient, chacune, une circonscription à part entière.

Ce qui a au moins l’avantage d’éviter qu’il ne s’y produise des inégalités évidentes de représentation des différentes provinces les composant, comme aujourd’hui.

Pour le Sénat, le projet prévoit de donner deux élus à chaque région au moins. Il y aurait trois élus dans les régions VI (O’Higgins) et X (Los Lagos), quatre dans les régions VII (Maule) et IX (Araucania), cinq dans les régions V (Valparaiso) et VIII (Bio Bio) et dix dans la région Métropolitaine.

Ladite région serait la seule à être divisée en deux circonscriptions (Une à l’Ouest, une à l’Est) de cinq sièges chacune. Le projet prévoit une clause de revoyure tous les dix ans pour la répartition des sièges en posant le principe suivant : 84 sièges attribués au minimum pour chacun des 28 districts ou circonscriptions constitués ; 66 sièges répartis à la proportionnelle à raison de la population sans que le moindre district ne puisse avoir plus de neuf députés.

Comme le pays est un pays dont la population bouge relativement beaucoup, les migrations régionales étant loin d’être inexistantes, on voit tout l’intérêt de la chose.

La vérité et le texte qui sera débattu et adopté pour les élections de 2017 sont sans doute à chercher dans le cadre d’un moyen terme entre ces deux projets.