Bras de fer
entre l’Argentine et les fonds vautours :
Le dangereux lobby de l’American Task Force Argentina (ATFA)
par
Un organisme,
proche des fonds vautours, l’ATFA mène un lobby actif anti-Argentine
aux Etats-Unis depuis des années, agitant le chiffon rouge du défaut de
paiement. Au-delà de la procédure qui oppose les fonds vautours à
l’Argentine, se pose la question de leur ronde sinistre autour des pays
endettés. En
réalité, l’Argentine ne subit pas que les assauts juridiques des fonds
vautours, notamment de celui de Paul Singer devant les tribunaux.
Derrière un véritable lobby – à travers l’ American Task Force Argentina (ATFA) a été organisé, il s’agit d’une sorte de paravent de fonds vautours comme NML Capital,
et son rôle revient à décrédibiliser, disqualifier la politique menée
par le gouvernement argentin, notamment quant à la restructuration de la
dette.
Lobby anti-argentin auprès du Congrès des Etats-Unis
Sous la bannière « Pursuing a fair reconciliation of the argentine debt defaut »,
qui pourrait sembler pleine de bonnes intentions, l’ATFA - qui se
définit comme une alliance d’organisations réunies dans cette finalité
et explique « être en contact avec des juristes et des médias pour
encourager le gouvernement des Etats-Unis à poursuivre vigoureusement un
accord négocié dans l’intérêt des détenteurs de titres étasuniens »-,
mène une bataille ouverte contre le gouvernement argentin actuel.
Jake Johnston dans le site CEPR (Center for economic and policy research, écrivait 18 octobre dernier, que l’American Task Force Argentina (ATFA), avait dépensé plus de trois millions de dollars dans son lobby contre l’Argentine depuis 2007.
De plus, l’ATFA cite parmi ses membres de nombreuses associations
d’exploitants agricoles ou de professeurs, du monde l’éducation qu’il
met en avant quand il décrit « l’importance de l’enjeu de forcer
l’Argentine à payer ce qu’elle doit et qu’il est un devoir des
Etats-Unis d’aller dans ce sens ». Mais selon le Wall Street Journal
- plusieurs des noms cités dans la page des membres n’avaient rien à
faire avec cette organisation : Mr. Matlack, président de l’American Agriculture Movement, joint par le quotidien économique, a déclaré n’avoir jamais entendu parlé de l’American Task Force Argentina, et n’avoir rien à faire avec la dette argentine ; Même chose pour la Colorado Conference of the American Association of University Professors, pour Ray Hogler, director , il n’a rien à voir avec cette organisation.
Depuis ceux-ci ont été retirés de la liste, mais comme l’analyse Jack
Jonhston, cet abus concernant les membres de l’ATFA devrait donner à
réfléchir aux politiciens du Congrès étasunien, si prompts à vouloir
agir au service des intérêts des fonds vautours. En fait l’ATFA
représente essentiellement des fonds vautours, notamment basés aux Iles
Cayman.
Pour mémoire, l’accord négocié sur la restructuration de la dette
argentine concerne 93% des créanciers, et ceux restés dehors sont des
fonds vautours. Les premiers ont participé à remettre le pays sur les
rails ; les intérêts des bons de la restructuration de la dette sont
liés à l’évolution du PIB argentin, qui a connu un taux de croissance
moyen de 8% depuis 2003.
Les fonds vautours, eux, achètent des titres de la dette en cessation de payements [défaut]
pour quelques centimes et usent ensuite des tribunaux, généralement
étasuniens, pour obtenir le remboursement à la valeur faciale : selon
l’agence Bloomberg, ils ont acheté 182 millions de dollars de dette à
20-30 centimes pour une valeur de 1 dollar.
Les Vautours et l’opposition argentine, une alliance tacite
L’ATFA révèle en fait ses vraies intentions : Un article en date du 20 novembre sur son site porte sur l’imminence de défaut de paiement de l’Argentine et à quel point les investisseurs doivent y faire attention. Cet organisme entretient savamment depuis des mois l’idée selon laquelle l’Argentine est au bord du défaut de paiement.
Certes, l’Argentine a dit qu’elle se refusait à payer ce que
réclamaient les fonds vautours. Certes, le juge new-yorkais Thomas
Griesa, a estimé que l’Argentine devrait payer 1 330 millions de dollars
aux vautours, montant qu’il doit transmettre pour le Ier décembre à la
Cour d’Appel, qui rendra son verdict ensuite. En attendant, l’échéance
« sur la dette négociée » due au 2 décembre, sera payée normalement,
assure l‘Argentine. Mais si la décision du juge Griesa était confirmée
et que l’Argentine ne payait pas les fonds vautours, elle pourrait être
déclarée en cessation de paiements aux Etats-Unis.
Les manœuvres de l’ATFA ne s’arrêtent pas là. Toujours sur son site,
on y voit en bonne place, un beau carton rouge avec écrit dessus
« Basta K » (en allusion à la présidente argentine) et dans un coin 8N
(date de la dernière manifestation de l’opposition argentine), et plus
loi de nombreuses photos de la dite manifestation. L’ATFA soutient les
opposants au régime actuel. Et au moins une partie des opposants
actuels, indirectement –voire directement- font donc clairement le jeu
des fonds vautours.
Pourtant, cette même opposition – souvent proche de la droite
extrême- devrait être piquée au vif de voir la Frégate Libertad, navire
école de la Marine, consignée au Ghana depuis le 2 octobre sur demande
du fonds vautour NML Capital. L’Argentine a d’ailleurs présenté devant
le tribunal international du droit de la mer -dont le siège est à
Hambourg, une demande de restitution, la frégate étant protégée par
l’immunité des bateau de guerre.
Après l’Afrique, l’Amérique Latine, l’Europe ?
L’enjeu des fonds vautours et de Paul Singer dépasse largement le cas
de l’Argentine, et concerne nombre de pays en développement ou
développés endettés ; comme le rappelait récemment dans la presse le
ministre des affaires étrangères argentin Hector Timerman, qui en
discutait avec son homologue sud-africaine Nkoana-Mashabane, les fonds
vautours ont opéré leur sinistre ronde tant sur l’Afrique que sur
l’Amérique Latine depuis des années. Et bientôt, l’Europe suivra.
Leur manœuvre a été mise à jour. La Jubilee Debt Campaing au Royaume Uni et la Jubilee USA Network,
ont fait pression pour que des mesures soient prises par leur
gouvernement contre ces agissements. Aujourd’hui la dette est
commercialisée comme une marchandise. Les fonds vautours agissent sans
vergogne, avec une machine bien huilée, et se prévalent toujours
d’utiliser des techniques légales. Légales mais peu éthiques. Ils
obèrent les possibilités de redressement, en pompant sur les aides à la
politique financière de la Banque Mondiale ou du FMI, à travers de
l’argent destiné à des grands travaux d’infrastructure ou des programmes
d’aides à l’éducation, et font ainsi leur culbute spéculative.
Article en relation sur le blog Libres Amériques :
Source : El Correo