jeudi 11 avril 2013

Guatemala, les femmes victimes au procès Rios Montt

Le corps de la femme 
comme 
objectif militaire


Par Marie Michele Longchamps

Troisième semaine du procès de Ríos Montt : Le 4 avril 2013 marque la clôture des témoignages proposés par le Ministère public et les deux organisations de partie civile- AJR et CALDH- dans le cadre du procès à l’encontre de l’ancien général Rios Montt et de son ex-chef de renseignements, Rodriguez Sanchez. Au cours des onze premiers jours, une centaine de témoins sont venus racontés les horreurs vécues entre 1982-1983. Cette semaine fut chargée en émotion alors que sont venues déclarées 10 femmes ayant été victimes de violations sexuelles aux mains de l’armée guatémaltèque.



Alors que nous avions initialement cru, à tort ou à raison, que leurs témoignages seraient entendus à huis clos, la juge a finalement refusé cette mesure discrétionnaire en invoquant le principe du débat oral et public. 

En effet, bien que l’article 356 du code de procédure pénal guatémaltèque prévoit la possibilité d’entendre des déclarations de cas de violations sexuelles à huis clos, cette décision demeure discrétionnaire et il semble que cela ne soit accordé que dans les cas impliquant des mineures. Toutefois, la juge présidente Jazmín Barrios a demandé à la presse de ne pas révéler l’identité des femmes et a accepté que ces dernières témoignent à visage couvert.



Cette mesure est nécessaire pour protéger l’anonymat des victimes, d’autant plus que la majorité des femmes nous ont confié lors de leur préparation qu’avant ce jour elles n’avaient jamais raconté leur agression à quiconque, pas même à leur famille. Il faut dire que dans la culture maya, le corps d’une femme est sacré et s’y attaquer viole le droit de la personne en plus de briser les liens familiaux et le tissu social. 

Les femmes violées sont souvent rejetées par leurs maris en plus d’être stigmatisées par leur communauté, qui leur donne le nom de « femmes de soldats ». La situation est encore pire lorsqu’un bébé naît à la suite d’une agression. En raison de l’incompréhension de la population de cette situation, le témoignage de la femme peut ainsi contribuer à sa « revictimisation ».



Paloma Soria Montañez, avocate de Women’s Link Worldwide rendra son expertise sur les violations sexuelles au cours de la semaine à venir. Elle abordera notamment la violence de genre en droit international, les violences commises contre les femmes mayas durant le conflit armé interne, ainsi que le modus operandi de ces violences des autorités. 

Cette expertise permettra de faire le lien entre les témoignages reçus et l’intention génocidaire des hauts dirigeants. La preuve reste toutefois fragile et circonstancielle puisqu’il n’y a pas de preuve d’un ordre direct émanant du chef d’État.


 

Le procès se poursuit avec le témoignage d’experts de la poursuite et la preuve de la défense. De l’avis de la juge, le procès devrait se terminer le 19 avril 2013, ce qui fera de ce procès de génocide le plus court de l’histoire…





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