lundi 15 avril 2013

Honduras, la liberté d’informer un enjeu plus que difficile

Les thèmes cruciaux de l’actualité nationale hondurienne exposent les journalistes à un danger croissant

Par RSF Amériques

Les conflits agraires, les problèmes environnementaux liés à l’extraction minière, l’“épuration” de la police ou encore la situation générale des droits humains constituent les thèmes essentiels de l’actualité hondurienne. Ils représentent aussi autant de vecteurs de danger pour les journalistes qui ont le courage de les traiter. Reporters sans frontières s’inquiète d’une nouvelle aggravation de cette chape répressive, à sept mois des élections générales du 10 novembre 2013.
L’organisation en appelle la communauté internationale, la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH), ainsi que les organismes d’intégration régionale comme la Communauté des États latino-américains et caribéens (CELAC) à placer l’enjeu de la liberté d’information au cœur de leurs relations avec le Honduras, pays toujours marqué par les séquelles du coup d’État du 28 juin 2009

Les autorités honduriennes doivent être rappelées en permanence à leur devoir de protection envers les journalistes et défenseurs des droits humains fortement menacés. Cette exigence concerne tout particulièrement des personnes travaillant de manière indépendante, ou localisées dans des régions traversées par d’importants conflits sociaux, comme celle du Bas Aguán ou la péninsule de Zacate Grande.
Un véhicule gris qui me suivait a retenu mon attention. J’ai vu que le conducteur se dissimulait, ça m’a paru curieux et m’a mise en alerte. Ca a duré quelques secondes. J’ai aperçu un objet métallique, puis j’ai entendu le bruit. J’ai traversé le boulevard et gagné mon lieu de travail.” C’est en ces termes que Fidelina Sandoval (en photo), journaliste du groupe audiovisuel national Globo, a décrit la tentative d’assassinat dont elle est heureusement sortie indemne, le 8 avril 2013 à Tegucigalpa.
Soutenue par le Comité des familles de détenus et disparus au Honduras (Cofadeh), la jeune femme a notamment couvert des cas d’épuration au sein de la police. Elle a également traité des conflits agraires dans la région militarisée du Bas Aguán. Son cas rappelle celui de sa collègue Karla Zelaya, séquestrée et torturée au mois de novembre dernier et directement menacée pour sa couverture des mobilisations paysannes.
“Karla Zelaya n’a jamais reçu la protection dont elle aurait dû bénéficier, malgré nos appels répétés. De même, nous avions alerté du danger encouru par la journaliste et défenseure des droits humains Itsmania Pineda Platero, officiellement ‘protégée’ par des policiers qu’elle avait mis en cause dans des affaires de corruption et d’abus de pouvoir.
Qu’en sera-t-il désormais de Fidelina Sandoval ? 

Le secrétariat d’État à la Justice et le Haut-Commissaire aux droits de l’homme doivent d’urgence mettre en œuvre un dispositif de protection adapté pour ces journalistes, dont la sécurité n’est en rien garantie”, a déclaré Reporters sans frontières.
Le vaste plan d’“épuration” de la police, engagé par le gouvernement depuis novembre 2011 dans le cadre de l’opération Éclair (Relámpago), n’a malheureusement rien résolu des graves violations des droits humains commis par les forces de l’ordre ni rendu justice à leurs victimes. Ce plan ne saurait aboutir s’il n’est assorti d’un désarmement des milices privées, très actives dans les régions de conflits agraires et miniers, coupables des mêmes atteintes.
Président de l’Association pour la développement de la péninsule de Zacate Grande (ADEPZA) et fondateur de la radio communautaire La Voz de Zacate Grande, Pedro Canales reste la cible constante des hommes de main du magnat de l’agro-industrie Miguel Facussé Barjum. Ce dernier sera-t-il convoqué devant la justice pour répondre des agissements de ses employés, aux méthodes paramilitaires ?
La vigilance particulière qu’appelle la situation des radios communautaires locales, vulnéarables aux attaques et aux pressions, dans le Bas Aguán ou à Zacate Grande s’applique désormais aux départements de Valle et Choluteca, où les communautés se mobilisent contre l’extraction minière.

Source : article et photos de Reporters sans frontières (Amériques)