jeudi 18 avril 2013

Venezuela, net recul du chavisme et contestations...

Le résultat 
de la présidentielle 
montre l'érosion 
du chavisme

Par Jessica Carrillo · Traduction de Suzanne Lehn

Les résultats de l'élection présidentielle du dimanche 14 avril 2013 ont illustré le début du reflux pour le chavisme. A peine deux mois ont suffi au président par intérim et maintenant président élu, Nicolás Maduro Moros, pour perdre 685.794 voix par rapport aux nombres obtenus par le Président Chávez le 7 octobre 2012, tandis que le candidat d'opposition Capriles Radonsky réussissait à engranger 679.099 voix de plus.

Des chiffres signifiant que malgré son avance héritée de 11 points, M. Maduro l'a emporté de moins de 2 points. Sur Twitter, Jogreg Henridonsky a préféré l'image pour rendre compte des résultats : Une manière de voir ce qui s'est passé hier…

Le premier bulletin publié par le Conseil Electoral National (CNE, selon l'acronyme espagnol) a déclaré Nicolás Maduro vainqueur avec un total de 7.505.338 voix, représentant 50,66% des suffrages. De son côté, Henrique Capriles Radonski a obtenu 7.270.403 voix, soit 49,07% –une différence d'à peine 1,59%, ou 234.935 votants, un résultat que n'avaient su prévoir les sondages.
Pendant ce temps, la coalition de la Table de l'Unité Démocratique (MUD) obtenait 7.270.403 voix, contre 6.127.522 à la coalition du Parti Socialiste Unifié du Venezuela (PSUV). Ces chiffres ont fait perdre au PSUV, pour la première fois, sa position de parti en tête des votes. Aux élections du 7 octobre, la coalition MUD n'avait pas participé en tant que telle, chaque parti avait soutenu Capriles séparément. Cette fois, l'opposition ne pouvait voter que pour la coalition MUD, qui a ainsi récolté plus de voix que le PSUV.
Cette mince différence d'à peine deux points en pourcentage et l'énorme quantité de plaintes diverses quant aux irrégularités (quelque 3.200 incidents) au long des opérations ont amené le gouverneur de l'Etat de Miranda, Henrique Capriles Radonsky, à ne pas reconnaître les résultats à moins d'un audit et d'un recomptage manuel des voix. 
La même requête a été émise par Vicente Díaz, un des cinq directeurs du CNE, après la publication du premier bulletin. Dans la soirée du dimanche, Nicolás Maduro acceptait l'audit.
Devant la polémique, débats et réflexions n'ont pas tardé à animer réseaux sociaux et blogs.
Jorge Media Azcarate a écrit un billet de blog intitulé “Félicitations au nouveau président dela démocratie populaire du Venezuela“, où il dit son désaccord avec le refus des résultats par Capriles. 

Pour Jorge, Capriles n'aurait pas dû se présenter s'il ne faisait pas confiance au système : Je voudrais particulièrement dénoncer la non-reconnaissance par le perdant Capriles des résultats de la consultation. Non seulement il me semble misérable de se présenter à une élection pour ne pas se soumettre ensuite à ses résultats (…si tu n'as pas confiance, ne te présente pas, crapule ! 

Et si tu te présentes, accepte les règles du jeu), mais cela me paraît aussi une grave INSULTE aux 140 observateurs internationaux qui supervisaient la légalité de la consultation… Qu'y a-t-il ? Ces observateurs sont maintenant des incompétents qui n'ont pas bien fait leur travail ?? Ils étaient valables avant, et plus maintenant ?
De son côté, sur son blog, Sofia Kariakin estime qu'avec ce nouveau président le Venezuela sera en panne de stratégies et d'objectifs, ce qui aggravera la situation du pays. Elle a fait part de ses réflexions dans son billet “Pause pour la résignation“.
Eh bien, je respire profondément pour les miens, qui continuent à croire qu'à un moment donné le Venezuela aura la possibilité de sortir de cet abîme où il se trouve, auparavant avec un type qui était vraiment un Leader.
Je comprends maintenant les moins chanceux qui disaient, quand il [Chávez] est mort, qu'ils se sentaient orphelins car c'est ce qu'ils allaient être… à présent il n'y a pas de stratégies, pas de fins… à présent c'est un baratin sans fond ni sens, à présent le pays va couler, et vous me direz : encore plus ? Eh oui… malheureusement si on accepte cette farce ce sera la destruction et la perte complètes pour le Venezuela.
Des milliers de réclamations ont été postées sur les réseaux sociaux. Dans de nombreux cas, les internautes ont fait écho à des épisodes erronés, qui une fois apparus en ligne se sont propagés comme une traînée de poudre.
La découverte de cartons remplis de votes et de bulletins dans la rue dans l'Etat de Barinas, n'a fait qu'échauffer davantage les électeurs.
Pour couronner le tout, la proclamation de Nicolás Maduroprésident par le CNE, sans recours à un audit, a accru le mécontentement à l'intérieur de l'opposition. Willy Mckey a affirmé sur Twitter que cette précipitation était suspecte.
Willy Mckey : Cet embarras dans la proclamation [de Maduro président] les met en évidence.
Tandis que Oliver Reina dit sur Twitter que jusqu'à preuve du contraire par l'audit, il n'y a pas de raisons de ne pas soutenir Nicolás Maduro.
Oliver Reina : Soutenir Maduro n'est pas illégitime : il y a un bulletin officiel du CNE. Si l'audit dit autre chose, le bulletin sera nul. Et sinon, non. C'est aussi simple que ça.

Cette marge très courte dans les résultats a déclenché dans le pays une crise politique qui pourrait se traduire en violences [De fait, il a été annoncé mardi que des manifestations la veille se sont soldées par la mort de sept personnes, des dizaines de blessés et une centaine d'arrestations].
Le magazine SIC, sur son blog, explique ce qui se dessine dans ces deux moitiés très différentes du pays.
Il ne sera pas facile pour le Président d'assumer qu'une grande partie des citoyens ne veulent pas se réveiller de ce rêve libertaire ou de ce cauchemar. Il ne sera pas facile de gouverner quand une part considérable de la citoyenneté ne veut pas entendre parler du pays concret, mais de l'histoire sculptée dans le bronze et le marbre comme un vain leurre d'éternité, et que l'autre [part] tout aussi considérable, a pour seul rêve que prenne fin ce qu'ils estiment néfaste et de revenir à un état antérieur idéalisé.

 
Laura Vida a contribué à l'écriture de ce billet

Source : Global Voices