Chili, Pérou et Bolivie
en eaux agitées :
les frontières maritimes,
sujets de discorde
Par Pablo Andres Rivero · Traduction de Lola Gazounaud
Les frontières internationales sont
souvent brouillées par la mondialisation et, en Amérique latine, les
frontières maritimes sont toujours matière à contestations. Deux pays
frontaliers, le Chili et le Pérou par exemple, qui ont pourtant joui
d’un développement économique soutenu au cours des dernières années,
demeurent en désaccord sur leurs frontières maritimes respectives, un
contentieux qui concerne une superficie maritime d’environ 38 000 mètres
carrés.
Pendant ce temps, le Pérou n’a eu de cesse d’affirmer que les
frontières maritimes n’avaient jamais été l’objet d’un accord qui les
définissait et les seuls documents à ce sujet, signés en 1950, ne font
que réglementer l’accès aux zones de pêche. En outre, Lima a
également déclaré que les frontières maritimes devaient être délimitées
par une diagonale qui, partant de la frontière terrestre du Pérou, se
dirigerait vers le large, direction Sud-Ouest.
Selon le Chili, les deux pays semblaient s’être mis d’accord sur la
délimitation de la frontière par une série de traités signés entre 1952
et 1954. Ces derniers stipuleraient que la frontière maritime entre le
Chili et le Pérou devait être délimitée selon un axe, non pas diagonal,
mais parallèle à la frontière maritime qui sépare, au Nord, les eaux
péruviennes et équatoriennes. Un accord qui, selon Santiago, a été
respecté au cours des soixante dernières années.
Le net-citoyen Juan Vargas, qui soutient la position chilienne, a posté un commentaire sur le site d’information Peru this Week :
Les accords de 1952 et de 1954 établissent clairement une frontière maritime [entre le Chili et le Pérou]. Ils sont disponibles, en version anglaise à l’adresse suivante : Cliquez ici !
Dans un blog hébergé par El Mirador, Oscar Maúrtua de
Romaña, ancien ministre péruvien des Affaires étrangères, présente, dans
un billet, les arguments des deux parties en litige et conclut :
En dépit de différents historiques, le Pérou et le Chili partagent une même destinée. Une résolution équitable de la Cour mettra fin à « ce litige frontalier, le dernier en date » qui compromet nos relations bilatérales. Il est rassurant de constater que 72 heures avant le début de l’audience, le Président péruvien Humala et le Président chilien Piñera avaient chacun déclaré qu’ils accepteraient tous deux la décision de la Cour Internationale de La Haye.
La Bolivie, enclavée, attend la décision de La Haye
Les deux pays impliqués ne sont pas les seuls concernés par le
contentieux puisque les pays avoisinants et notamment la Bolivie,
observent de près les procédures légales en cours. Cette dernière
prévoit d’ailleurs, comme annoncé antérieurement, de faire appel à la CIJ afin d’obtenir un accès à l’océan,
accès perdu lors de la guerre du Pacifique qui, de 1879 à 1881, l’opposa
au Chili. La décision de La Haye pourrait, en effet, représenter un
fort encouragement à la volonté bolivienne de régler cette question de
longue date par la voie diplomatique.
Sans compter la résolution de la Cour Internationale, les
déclarations démocratiques et diplomatiques des deux parties en litige
ont réduit, de façon significative, les risques d’un conflit armé entre le Chili et le Pérou.
De même, ce mode de résolution de conflit a permis de poser les bases
en faveur de l’émergence de solutions plus créatives dans le but
d’apaiser les crises dans la région. Parmi ces possibles solutions, une
éventuelle « Zone Maritime de Participation Bilatérale », proposée par
Jilmar Moisés Córdova, qui soutient, à ce sujet :
Le contentieux maritime entre le Pérou et le Chili pourrait être résolu grâce à ladite « Zone Maritime de Participation ou d’Usage Bilatéral » qui diviserait les eaux des deux Etats et créerait ainsi une zone commune pour la pêche, […] l’exploitation des ressources par les bateaux à la fois chiliens et péruviens d’un tonnage défini, comme l’ont institué par traité l’Argentine et l’Uruguay afin de délimiter leurs eaux territoriales respectives.
De plus, Jilmar Moisés Córdova a considéré qu’une telle alternative
offrirait aux deux pays la possibilité d’explorer et de bénéficier de
ressources minérales et pétrolières, entre autres. Córdova parait
également confiant face à la situation bolivienne puisque cette Zone
Maritime de Participation Bilatérale pourrait faire émerger des options
alternatives pour répondre à l’aspiration de la Bolivie d'accéder aux
côtes pacifiques.
Source : Global Voices