mardi 19 février 2013

Europe/Etats-Unis, accord de libre échange en perspective ?

Accord de libre-échange transatlantique Union Européenne – Etats-Unis : Plus d’injustice, de chômage et de destruction environnementale


Par l'AITEC

Appel à mobilisation en Europe et aux États-Unis : Le Président Obama, le Président du Conseil de l’Union Européenne Van Rompuy et le Président de la Commission européenne Barroso se sont engagé le 13 février à démarrer les négociations pour un accord de libre-échange et d’investissement Union Européenne – États-Unis qui pourrait affecter fortement les droits sociaux, environnementaux ainsi que les droits du travail des deux côtés de l’Atlantique et approfondir la libéralisation mondiale du commerce et de l’investissement.


En effet, les élites de part et d’autre visent explicitement une plus grande convergence réglementaire transatlantique et l’harmonisation des réglementations futures entre les États-Unis et l’Union Européenne, dans le seul intérêt des entreprises multinationales et de l’industrie financière.

Le 13 février 2013, le Président des États-Unis Barack Obama, le Président du Conseil de l’Union Européenne Herman Van Rompuy et le Président de la Commission européenne José Manuel Barroso ont publié une déclaration annonçant que « Les États-Unis et l’Union Européenne vont chacun initier les procédures internes nécessaires au lancement de négociations sur le partenariat commercial et d’investissement transatlantique », sur la base d’un rapport finalisé le le 12 février et commandé en 2011 à un « groupe de travail Union Européenne – États-Unis de haut niveau ». 

Ce rapport fixe des cibles « ambitieuses » dans des champs classiques de libéralisation, tels qu’un « paquet pour l’accès au marché allant au-delà de ce que les États-Unis et l’Union Européenne ont atteint dans de précédentes négociations ou la libéralisation de l’investissement et des régimes de protection basé sur les plus hauts niveaux de libéralisation et les standards les plus élevés concernant la protection que les deux parties ont négociés à ce jour ». 

Cet agenda, dessiné par les puissants lobbies du business et négocié à huis clos, pourrait avoir un impact dramatique sur la vie des populations, l’emploi et l’espace politique nécessaire à des politiques publiques légitimes, comme cela a été largement documenté et condamné par la société civile ces dernières décennies. Une plus grande circulation des biens, des capitaux et des services signifie une compétition plus rude entre les travailleurs et entre les paysans, ce qui signifie encore davantage de pouvoir pour les grandes entreprises et une multitude d’autres attaques néolibérales agressives contre les droits sociaux, du travail et les droits humains tels que la santé, l’éducation, l’eau, le logement etc.


“Convergence réglementaire” et supra-gouvernance Union-Européenne – États-Unis


Mais la recommandation centrale de ce rapport est de « réduire les coûts associés aux différences réglementaires par la promotion d’une plus grande compatibilité, y compris, lorsque cela est approprié, par une harmonisation des réglementations futures ». Ceci a déjà été accepté par les gouvernements européens qui ont déclaré au Sommet de l’Union Européenne (8 février 2013) viser une plus grande convergence réglementaire transatlantique. Ce qui était une réponse à la déclaration de la Commission pour une « coordination des négociateurs et des régulateurs entre les différentes formations du Conseils et comités du Parlement européen ainsi qu’entre l’Union européenne et les États-Membres. 

Nos partenaires ne feront preuve de flexibilité sur les changements réglementaires que nous recherchons que si nous démontrons une flexibilité similaire de notre côté ». Et la Commission d’ajouter « Il ne s’agit pas de tirer vers le bas les règles et standards de l’Union Européenne ». Mais c’est précisément cela dont il pourrait bien s’agir ! « Les coûts associés aux différences réglementaires » signifient fondamentalement tous les domaines pour lesquels les législations européenne et américaine diffèrent, c’est-à-dire pratiquement toutes. Les politiques commerciales de l’Union européenne et des États-Unis ont toujours été caractérisées par des négociations secrètes et anti-démocratiques lourdement influencées par les lobbies du business, la corruption et les conflits d’intérêts. 

Et nos gouvernements s’accordent désormais à dire que de tels processus devraient pouvoir décider de toutes les questions présentes et futures ? Des politiques alimentaires et de santé ? Des normes concernant le travail et l’environnement ? Pour qu’elles soient identiques au sein de l’Union européenne et aux États-Unis ? Allons-nous accepter une convergence avec les standards américains concernant les OGM, la fracturation hydraulique des sols (fracking), les lois du travail ou la protection de la vie privée ? Et les travailleurs aux États-Unis continueront-ils à accepter que les grandes entreprises européennes abaissent et utilisent les standards environnementaux et le droit du travail, jusqu’à violer parfois les lois américaines ?


Union Européenne – États-Unis et au-delà (Canada, Japon...) - Une façon de contourner l’impasse de l’OMC


Les négociations commerciales multilatérales à l’OMC sont dans l’impasse depuis maintenant plus d’une décennie, du fait de l’incompatibilité des demandes des pays « développés » (réclamant davantage de libéralisation) et « en développement » (réclamant une réforme ainsi qu’une réparation pour les accords injustes du passé). Ce rapport énonce clairement que les négociations commerciales Union Européenne – États-Unis sont un moyen de contourner ce blocage en créant le plus grand marché commun au monde et en imposant par la suite ce niveau de libéralisation commerciale au reste du monde : Étant données la taille et l’influence de ce partenariat transatlantique [ils doivent] “contribuer au développement de règles mondiales qui peuvent renforcer le système commercial multilatéral »6.


Les négociations commerciales ne traitent pas seulement du commerce


Comme dit précédemment, d’ « ambitieuses » négociations secrètes risquent de limiter fortement la capacité des populations à choisir des politiques publiques légitimes dans tous les domaines (social, environnemental, budgétaire, régulation financière...) visant à garantir les droits universels. Le rapport précise l’objectif de réduction des coûts non nécessaires et des délais administratifs découlant de régulations, tout en atteignant les niveaux de santé, de sécurité et de protection environnementale que chaque partie juge appropriés, ou en réalisant des objectifs réglementaires légitimes. Cette faible recommandation se traduira au mieux par un passage purement déclaratif dans le préambule non-contraignant de l’accord futur, ce qui est l’un des nombreux arguments pour lesquels la société civile s’opposera à ces négociations commerciales néolibérales.


Ceci est un appel à tou-te-s : mouvements sociaux, syndicats, organisations de défense des droits humains, mouvements paysans, organisations environnementales mais également décideurs politiques, membres du Parlement européen, membres du Congrès des États-Unis, des parlements nationaux et autres. Un accord de libre-échange Union-Européenne – États-Unis affectera les droits des populations et de l’environnement des deux côtés de l’Atlantique ! Luttons ensemble pour stopper ces négociations et le régime commercial et d’investissement actuel ! Et luttons ensemble pour la justice sociale et environnementale, un mandat commercial alternatif ainsi qu’une démocratie réelle.



Notes :