jeudi 28 février 2013

Colombie, de forts doutes sur la lutte contre l'impunité

Extrait de la Déclaration 
d'Amnesty International à la 22e session 
du Conseil des droits de l'homme 
des Nations unies sur la Colombie


Par Amnesty International - France 

(...) Malgré les pourparlers de paix, les parties au conflit – les forces de sécurité, qui agissent seules ou en collusion avec les paramilitaires, et les mouvements de guérilla – continuent de commettre de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire, notamment des homicides illégaux, des déplacements forcés, des tortures, des enlèvements ou des disparitions forcées et des violences sexuelles.


Les civils, en particulier les membres des populations autochtones, les Afro-descendants et les communautés paysannes, les défenseurs des droits humains, les dirigeants de communauté et les syndicalistes continuent de subir les conséquences du conflit armé.

Les progrès récents des tribunaux civils, qui ont traduit en justice au moins une partie des personnes responsables de ces abus et violations, en particulier dans plusieurs cas emblématiques pour les droits humains, sont susceptibles d'être stoppés par des législations récentes, et notamment par la réforme du système de justice militaire, qui aggravera l'impunité dans le pays.

La Loi relative aux victimes et à la restitution des terres a cependant le potentiel de faire une réelle différence pour au moins quelques-unes des millions de victimes d'atteintes aux droits humains. Cependant, les menaces et les assassinats visant ceux qui font campagne pour la restitution des terres ou qui cherchent à retourner sur leurs terres pourraient compromettre la mise en œuvre de cette loi.

L'impunité

Le soutien apporté par le gouvernement à plusieurs réformes législatives soulève des doutes quant à son engagement à faire cesser l'impunité. En décembre 2012, le Congrès a approuvé une réforme octroyant aux militaires un plus grand contrôle sur les enquêtes criminelles concernant des membres des forces de sécurité impliqués dans des violations des droits humains. 

De ce fait, certaines affaires de ce type pourraient être transférées au système de justice militaire, ce qui est contraire aux normes internationales relatives aux droits humains. En juin 2012, le Congrès a approuvé un « cadre juridique pour la paix » qui pourrait également permettre aux auteurs d'atteintes aux droits humains d'échapper à la justice.

 En décembre 2012, le Congrès a adopté une réforme de la loi Justice et Paix qui a prolongé le délai pour les démobilisations. Tout cela a constitué un message dangereux, susceptible d'encourager les parties au conflit à poursuivre leurs violations des droits humains et autres abus, tout en pouvant bénéficier des dispositions de la loi Justice et Paix.

Bien que la Colombie ait ratifié en 2012 la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, elle n'a pas reconnu la compétence du Comité des Nations unies sur les disparitions forcées pour examiner les communications individuelles, privant ainsi les victimes et leurs familles d'un important moyen de recours à la justice. Les chiffres exacts sont difficiles à établir, mais on estime à au moins 30 000 le nombre de victimes de disparitions forcées pendant le conflit.
 
 

La communauté internationale joue un rôle fondamental dans la résolution des violations graves des droits humains et de la crise humanitaire colombienne. Elle doit continuer à coopérer activement avec le gouvernement colombien.