d'Amnesty
International à la 22e session
du Conseil des droits de l'homme
des
Nations unies sur la Colombie
Par Amnesty International - France
(...) Malgré les pourparlers de paix, les parties au conflit – les forces
de sécurité, qui agissent seules ou en collusion avec les
paramilitaires, et les mouvements de guérilla – continuent de commettre
de graves violations des droits humains et du droit international
humanitaire, notamment des homicides illégaux, des déplacements forcés,
des tortures, des enlèvements ou des disparitions forcées et des
violences sexuelles.
Les civils, en particulier les membres des populations autochtones,
les Afro-descendants et les communautés paysannes, les défenseurs des
droits humains, les dirigeants de communauté et les syndicalistes
continuent de subir les conséquences du conflit armé.
Les progrès récents des tribunaux civils, qui ont traduit en justice
au moins une partie des personnes responsables de ces abus et
violations, en particulier dans plusieurs cas emblématiques pour les
droits humains, sont susceptibles d'être stoppés par des législations
récentes, et notamment par la réforme du système de justice militaire,
qui aggravera l'impunité dans le pays.
La Loi relative aux victimes et à la restitution des terres a
cependant le potentiel de faire une réelle différence pour au moins
quelques-unes des millions de victimes d'atteintes aux droits humains.
Cependant, les menaces et les assassinats visant ceux qui font campagne
pour la restitution des terres ou qui cherchent à retourner sur leurs
terres pourraient compromettre la mise en œuvre de cette loi.
L'impunité
Le soutien apporté par le gouvernement à plusieurs réformes
législatives soulève des doutes quant à son engagement à faire cesser
l'impunité. En décembre 2012, le Congrès a approuvé une réforme
octroyant aux militaires un plus grand contrôle sur les enquêtes
criminelles concernant des membres des forces de sécurité impliqués dans
des violations des droits humains.
De ce fait, certaines affaires de ce
type pourraient être transférées au système de justice militaire, ce
qui est contraire aux normes internationales relatives aux droits
humains. En juin 2012, le Congrès a approuvé un « cadre juridique pour
la paix » qui pourrait également permettre aux auteurs d'atteintes aux
droits humains d'échapper à la justice.
En décembre 2012, le Congrès a
adopté une réforme de la loi Justice et Paix qui a prolongé le délai
pour les démobilisations. Tout cela a constitué un message dangereux,
susceptible d'encourager les parties au conflit à poursuivre leurs
violations des droits humains et autres abus, tout en pouvant bénéficier
des dispositions de la loi Justice et Paix.
Bien que la Colombie ait ratifié en 2012 la Convention internationale
pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions
forcées, elle n'a pas reconnu la compétence du Comité des Nations unies
sur les disparitions forcées pour examiner les communications
individuelles, privant ainsi les victimes et leurs familles d'un
important moyen de recours à la justice. Les chiffres exacts sont
difficiles à établir, mais on estime à au moins 30 000 le nombre de
victimes de disparitions forcées pendant le conflit.