Deux procès
contre l’ancienne dictature :
Le procès du camp de la mort
« Campo de Mayo »
et le procès de
« l’opération Condor »
Par Libres Amériques
Lors d’un procès qui s'est tenu à Buenos-Aires, le 12 mars
2013, cinq tortionnaires argentins accusés d'avoir commis des crimes contre
l'humanité au détriment de 20 victimes détenues à « Campo de Mayo » au
cours de la dernière dictature militaire, ont été condamnés à la prison à
perpétuité. Dans le même temps s’est ouvert le procès de « l’opération
Condor » (1), ou l’on retrouve sur le siège des accusés, l’ancien
dictateur Jorge Videla et 24 autres supposés complices.
La peine a été prononcée par une cour de justice de la
capitale argentine (Tribunal Oral en lo Criminal Federal No.1) contre l’ancien. Gouverneur, Reynaldo
Benito Bignone et l'ancien commandant de l’Institut militaire de Santiago, Omar
Riveros.
De même, José Carlos Somoza a été reconnu coupable et condamné à 25 ans de
prison, ainsi qu’Hugo Castagno et Julio San Roman à 20 ans de prison, Eugenio
Guarañabens (16 ans), Carlos Hidalgo (15 ans) et Maria Francisca Morillo (12
ans). La lecture de tous les attendus de la sentence aura lieu le 14 mai
prochain.
Le camp de concentration et de torture « Campo de
Mayo »
« Campo de Mayo » a été l'un des plus grands
centres de détention clandestins de Buenos Aires, et l'on estime qu'il y est
passé environ quatre mille personnes. Dans ses installations fonctionnèrent une
maternité clandestine connue sous le nom d’El Campito et 3 trois centres de
détention arbitraires.
Ouverture du procès de "l’opération Condor" (1)
L'opération Condor est une opération clandestine
transnationale. Organisée par les régimes militaires d'Amérique du Sud, avec le
support tacite des États-Unis, elle vise à l'élimination de personnes jugées
«subversives». Des centaines d'entre elles, spécialement ciblées, seront
torturées, assassinées ou portées disparues.
Le verdict du procès des crimes commis contre l'humanité à
Campo de Mayo, a été prononcé au moment, où débute le procès des 25
tortionnaires accusés dans l'opération Condor.
Dans les requêtes préliminaires présentées par le Procureur
général, l'ancien dictateur Jorge Rafael Videla et l’ancien Gouverneur Bignone
sont désignés et entendus comme accusés, dans le cadre d'une association
illicite, dédiée à la disparition forcée de personnes, comme entre autres
crimes. Le Ministère publique a
précisé que cette structure trouva son origine dans la dictature militaire
ayant pris le pouvoir en mars 1976 et souligne que l'objectif du projet macabre
était l’élimination systématique des opposants politiques, même si ensuite son
application a été étendue à d'autres domaines.
Pour mener à bien cette opération a été utilisée, non
seulement les structures formelles de l'Armée, de la Marine et du Commandement
aéronautique, mais aussi le ministère de l'Intérieur, la police fédérale, la
Gendarmerie Nationale, la Garde côtière et le Service pénitentiaire fédéral.
Au cours du procès de l'Opération Condor se présentera 500
témoins, de sorte que l'on estime que les débats dureront au moins deux ans.
Les 25 accusés devront répondre, à plus de 220 cas de violations présumées des
droits de l'homme et de crimes, comme l’association illicite et la privation
illégale de liberté.
L'opération Condor en Argentine
Note :
(1) 28 novembre 1975 -
Déclenchement de l'opération Condor
(source Université de Sherbrooke)
L'opération Condor s'inscrit dans le contexte de la Guerre
froide et de la sale guerre menée par les régimes militaires d'Amérique latine
avec l'appui des services secrets et du gouvernement américain. Elle fait
partie d'une campagne de répression qui fera plus de 50 000 tués et 35 000
disparus entre 1975 et 1983.
Ses dessous seront révélés en 1992, avec la découverte de
ses archives secrètes au Paraguay.
L'opération Condor voit le jour dans la foulée du coup
d'État de 1973 au Chili. Dès mars 1974, des représentants des polices du Chili,
de la Bolivie, de l'Argentine et de l'Uruguay se rencontrent afin de collaborer
à la destruction des foyers subversifs.
En septembre, la police secrète chilienne, avec l'aide de la
police argentine, organise l'assassinat à Buenos Aires du général chilien en
exil Carlos Prats, considéré comme une menace par le président Augusto
Pinochet. À l'été 1975, 119 membres des partis de gauche chiliens sont
éliminés.
En novembre 1975, les services secrets de six régimes
autoritaires (Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Paraguay, Uruguay), ainsi que
ceux du Pérou et du Venezuela, à un moindre degré, lancent l'opération Condor
qui a trois volets :
1 - coopération pour la surveillance de certaines personnes
avec création d'une base de données communes et échange d'informations;
2 - opération transfrontalière pour enlever, interroger et faire disparaître des adversaires;
3 - création d'une équipe spéciale pour assassinats ciblés.
Parmi les victimes de l'opération Condor, on retrouve
Orlanto Letelier, un ancien ministre des Affaires étrangères du Chili, ainsi
que l'ex-président bolivien Juan José Torres. Des prêtres, des étudiants et des
enseignants jugés subversifs seront aussi tués avant que l'opération ne cesse
avec la fin de la dictature argentine, en 1983.