jeudi 14 mars 2013

Haïti, la démocratie mise à mal par le pouvoir Exécutif

Les organismes de droits humains dénoncent la subordination du législatif et du judiciaire à l’exécutif

Par les organisations haïtiennes de promotion et de défense des droits humains

La crise politique persiste, les prochaines élections dans l’impasse. La publication, par le président Joseph Michel Martelly, de l’amendement contesté de la Constitution du 29 mars 1987 a plongé Haïti dans une crise politique très profonde… Une violation grâve au regard des procédures tracées par la Constitution de 1987. Les acquis démocratiques menacés par le pouvoir exécutif. Par manque de sérieux de certains de ses membres, le pouvoir législatif a failli à sa mission principale, qui est de légiférer et de contrôler l’action gouvernementale.


Contexte de la crise

Les organisations haïtiennes de promotion et de défense des droits humains constatent que la publication par le président de la république de l’amendement, contesté, de la Constitution de 1987, a plongé le pays dans une crise politique très profonde.

Rappelons que l’acte posé par le président Martelly, en juin 2012, est une violation grave au regard des procédures tracées par la Constitution de 1987 en son article 284-2, car seul le président, sur lequel l’amendement a été voté, est autorisé à le signer.

Après la publication de l’amendement de la Constitution,, le 18 juin 2012, le président de la république a cavalièrement procédé à l’installation du conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj), le 3 juillet 2012. Ce dit conseil a été éclaboussé, le 24 juillet 2012, par le scandale relatif à la mise en place du Conseil Électoral.

Malgré les diverses contestations des organisations sociales, des acteurs politiques, d’une certaine frange de la communauté internationale du choix des trois (3) représentants du Cspj et de l’un des trois représentants du pouvoir exécutif au sein du CEP contesté, par des procédures irrégulières et d’une manière illégitime, le président de la république, Joseph Michel Martelly, continue d’enliser le pays dans des crises en cascade, par d’autres mesures illégales ouvrant la voie à des contestations légitimes.

Citons, entre autres :

• L’arrêté Présidentiel du 15 Août 2012, nommant le Conseil Electoral de 6 personnes, le jour de la fête de l’assomption et férié. Ce qui est contraire à l’esprit et la lettre de la Constitution de 1987, en ses articles 192 et 193 ;
• La nomination et l’installation d’une Directrice Générale au Conseil Électoral, bien avant les procédures qui devraient aboutir à la mise en place de ce dit conseil, en violation de la loi ;
• L’installation du Conseil Électoral contesté, par le président de la république ;
• La nomination d’un Directeur des Opérations Électorales, en violation de la loi.

Une bonne partie du conseil supérieur du pouvoir judiciaire et du parlement à la solde de l’exécutif

Le président du Cspj, Me Anel Alexis JOSEPH, par ses comportements et son manque de leadership, entrave le fonctionnement du conseil supérieur du pouvoir judiciaire. C’est un président qui ne respecte pas ses attributions.

De par son comportement puéril, Me Anel Joseph semble ne pas savoir ou il semble ignorer que le pouvoir judiciaire doit fonctionner impérativement en toute indépendance, pour pouvoir gagner la confiance de la population et faire avancer la démocratie dans le pays.

La décision cavalière de Me Joseph d’écrire, à plusieurs reprises, le président de la république, lui demandant d’intervenir dans les affaires internes du Cspj, soit dans le dossier du CEP, soit dans le dossier de Me Néhémy Joseph, justifie son incapacité et son manque de leadership pour diriger le Cspj.

Les organisations des droits humains pensent que le travail principal du Cspj, qui est l’administration du pouvoir judiciaire, en passant par la certification des magistrats, n’est pas pris en compte par les membres du Cspj, dans un contexte où les acquis démocratiques sont menacés par le pouvoir exécutif.

D’un autre côté, le pouvoir législatif, par manque de sérieux de certains de ses membres, a failli à sa mission principale qui est de légiférer et de contrôler l’action gouvernementale.
Comment les Députés vont contrôler l’action du gouvernement, en se regroupant dans un bloc proche du pouvoir ? Comment peut-on être juge et partie à la fois ?

Les recommandations des organisations des droits humains

Les organisations haïtiennes de promotion et de défense des droits humains croient qu’il est urgent et nécessaire d’organiser les élections dans le courant de l’année 2013, sans aucune forme de tergiversation.

En ce sens, elles recommandent aux autorités publiques ce qui suit :

Au président de la république :

• Annuler l’arrêté du 15 Août 2012, nommant les 6 premiers conseillers du CEP contesté ;
• Respecter l’indépendance des trois pouvoirs et ne pas s’immiscer dans leurs pouvoirs propres ;
• Prendre les dispositions nécessaires pour l’organisation des élections à la fin de l’année 2013 ;
• Donner suite à la résolution du sénat de la république, réclamant la mise à l’écart de trois juges injustement désignés pour être membres à la Cour de Cassation ;
• Mettre en place un conseil électoral de consensus avec la participation de différents acteurs et actrices de la vie nationale.
Au conseil supérieur du pouvoir judiciaire (Cspj)  :
Les organisations haïtiennes des droits humains demandent au président du Cspj, de reconnaître que ses comportements entravent le bon fonctionnement du Conseil et menacent, une fois de plus, l’indépendance du Pouvoir Judiciaire ;

Aux autres membres du Cspj de :

• Ne pas se laisser instrumentaliser par le pouvoir exécutif et les acteurs du pays ;
• Respecter scrupuleusement la Constitution et les Lois de la République ;
• Enterrer les propositions indécentes de Me Anel Alexis JOSEPH ;
• Maintenir le vote légal et légitime du 09 octobre 2012 ;
• Prendre des dispositions nécessaires en vue d’adopter et d’appliquer les règlements internes du Conseil.

Aux parlementaires de :

• Prioriser la défense des intérêts fondamentaux de la Nation ;
• Consulter leurs mandants et les organisations sociales dans les décisions visant l’organisation des élections Locales, Municipales et Sénatoriales Partielles ;
• Exercer effectivement le pouvoir de control que les confère la Constitution de 1987.
Port-au-Prince, le 5 mars 2013.

Signataires :

Jocelyne Colas, Directrice Nationale Commission épiscopale Justice et Paix de l’église catholique romaine (Ce-Jilap)
Pierre Espérance, Directeur Exécutif Réseau national de défense de droits humains (Rnddh)
Antonal Mortimé, Secrétaire Exécutif Plateforme des organisations haïtiennes de droits humains (Pohdh)


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Source : Alterpresse (Haïti)