de la
contamination
par les armes
Par le Comité International de la Croix Rouge
En 2012, en Colombie, le CICR est venu en aide à plus de 200
victimes de la contamination par les armes. Bon nombre de ces personnes ont dû
abandonner leur foyer, ont perdu leurs moyens de subsistance ou sont devenues
incapables de travailler et tentent de survivre avec de graves séquelles
physiques et psychologiques. Trois des personnes qui ont bénéficié du soutien
du CICR à Florencia, dans le sud-est de la Colombie, nous racontent comment
elles s’efforcent de surmonter les difficultés qu’elles rencontrent.
Il est 13 h 40 et Alberto Montenegro se prépare pour sa
séance de physiothérapie à l’hôpital de Florencia (département de Caqueta),
dans le sud-est de la Colombie. Il porte un soin tout particulier à régler les
derniers détails, car il sait que la réussite de sa réadaptation et la pose de
sa prothèse en dépendent. Ses amis Hector et Aldemar, qui vont l’accompagner,
l’attendent patiemment sur le pas de la porte.
Alberto, Hector et Aldemar sont agriculteurs et ont presque
toujours vécu dans les régions rurales du département de Caqueta. L’amitié qui
les lie aujourd’hui est le fruit d’un accident dû à la contamination par les
mines, conséquence du conflit armé.
Comme l’explique Rodrigo Marles, assistant du CICR à
Florencia, « on parle de contamination par les armes pour indiquer la présence
de mines antipersonnel, de restes explosifs de guerre et d’engins explosifs
improvisés dans une zone déterminée ». Bien que difficile à estimer, le nombre
de victimes de la contamination par les armes est impressionnant. Rien qu’en
2012, dans les départements couverts par la sous-délégation de Florencia
(Huila, Caqueta et Putumayo), le CICR a enregistré 63 victimes civiles.
23 décembre 2009 : mort, déplacement et incertitude
Hector Marin Perdomo vivait dans sa propriété depuis 23 ans.
« Un jour, alors que nous déplacions le bétail d’un enclos à un autre, mon fils
a trouvé un engin explosif. À peine l’avait-il touché que l’engin a explosé, le
tuant sur le coup. Je me trouvais à une vingtaine de mètres et j’ai été
grièvement blessé. Je suis resté à l’hôpital pendant 29 jours et je dois encore
subir une opération. »
Hector et sa famille se sont alors installés à Florencia, où
ils sont restés 18 mois avant de s’en aller exploiter une propriété dans une
autre région. « Le changement a été très dur, car nous n’étions pas habitués à
vivre dans une ville ou un village. »
Les mines antipersonnel, les restes explosifs de guerre et
les engins explosifs improvisés ont aussi d’autres conséquences humanitaires »,
déclare Rodrigo Marles. « Les communautés se déplacent ou sont isolées. Elles
vivent dans la crainte et ont des difficultés à accéder aux services de santé.
Le taux d’abandon scolaire est très élevé. À cause de la contamination par les
armes, les habitants ne peuvent pas accéder à leurs terres et voient leurs
revenus diminuer. »
23 mars 2008 : une lutte permanente
La veille de son accident, José Aldemar Vasquez avait
entendu des combats dans la zone. Ce qu’il ne savait pas, c’est que traverser
la zone pouvait donc être dangereux. Près de cinq ans après son accident, il a
encore aujourd’hui des séquelles. « Mon pied me gêne depuis plus de quatre ans
avec des mouvements incontrôlés », se plaint-il. « Je passe mon temps à lutter.
»
Aldemar peut pourtant se considérer heureux ne pas avoir
perdu de membre comme la plupart des victimes de la contamination par les
armes.
27 février 2011 : une nouvelle vie
Alberto se rappelle bien les moments difficiles qu’il a
vécus après son accident. Il se sentait mal dans sa peau. Il pensait qu’il
allait mourir et il ne connaissait personne à Florencia. Le temps a aidé à
guérir les blessures. « Tout a changé du jour au lendemain, quand je suis
arrivé au foyer Henry Dunant de la Croix-Rouge colombienne. J’y ai reçu le
soutien de plusieurs institutions. Aujourd’hui, je suis des séances de
physiothérapie et je marche beaucoup mieux : j’ai une nouvelle vie devant moi.
»
L’action du CICR dans le domaine de la contamination par les
armes revêt deux aspects. D’une part, l’institution aiguille les victimes dans
le système de prise en charge, les informe de leurs droits et leur apporte un
soutien financier pour les aider à couvrir leurs frais d’hébergement, de
nourriture et de transport pour toute la durée des soins. D’autre part, le CICR
mène des activités de prévention et organise des ateliers à l’intention des
communautés afin de leur apprendre à adopter des comportements plus sûrs.
Dans le cadre d’un dialogue confidentiel, le CICR rappelle
aux acteurs armés l’obligation qui leur incombe de protéger et de respecter la
population civile, ainsi que de se limiter aux moyens et méthodes de guerre
autorisés par le DIH. Il aborde également avec eux la question des effets et
des conséquences humanitaires de l’emploi et de l’abandon d’armes explosives.
Alberto, Hector et Aldemar savent que leur vie ne
redeviendra jamais comme avant leur accident. Ils sont heureux des promesses
d’aide formulées par les autorités et espèrent que cela leur permettra de
démarrer une nouvelle vie. Ils entendent en tout cas rester à la campagne. «
Nous sommes de la campagne et nous le savons. À la campagne, nous saurons
prendre soin de nous et nous pourrons mener une vie plus tranquille, sans que
tout le monde sache ce qui nous est arrivé », déclare Hector.
Source : CICR